Avant-première de l’Avocat de la terreur, de Barbet Schroeder : Jacques Vergès ou l’avocat au parcours complexe

octobre 27th, 2007

La salle Algéria, à Alger, a abrité mercredi dernier la projection en avant-première du documentaire long métrage L’Avocat de la terreur, réalisé par Barbet Schroeder durant l’année en cours. Sélectionné dans la catégorie « Un certain regard » du 60e Festival international de Cannes (2007), le film retrace en 2 heures 15 mn le parcours du célèbre avocat français Jacques Vergès.

Outre le témoignage de celui-ci, le réalisateur a donné la parole à de nombreuses personnes ayant connu Jacques Vergès, à l’exemple des « terroristes » ou militants de l’indépendance de leurs pays, avocats, écrivains, journalistes, amis, agents des services de sécurité, etc. Ainsi, ont défilé sur l’écran, entre autres, Yacef Saâdi, Magdalena Kopp, Anis Naccache, Djohar Akrour, Zohra Drif, Lionel Duroy et Carlos pour mettre en lumière l’engagement politique et la carrière professionnelle de l’avocat. Né en 1925 en Thaïlande d’un père réunionnais et d’une mère vietnamienne, Jacques Vergès s’intéresse très tôt à la politique d’autant qu’il se voit un « colonisé ».

« Une période où les colonisés devaient s’écarter sur la route lorsqu’un Occidental passait », comme il le rappelle dans le film. Il s’engage dans la résistance aux côtés des forces de la France libre. Opposé à la guerre d’Indochine et anticolonialiste, il défend les militants du FLN-ALN, à l’exemple de Djamila Bouhired, torturée et condamnée à mort pour attentat à la bombe du Milk bar à Alger, le 30 septembre 1956.et qu’il finit par épouser après l’indépendance de l’Algérier. « Je comprends parfaitement la lutte des Algériens et je ne condamne pas leur violence », indique Vergès dans le documentaire. Après l’indépendance de l’Algérie, il crée la revue Révolution africaine. De 1970 à 1978, il disparaît pour vivre clandestinement.

Mais pour quelles raisons a-t-il fait ce choix ? Cela reste un mystère. Certains disent qu’il a fait du renseignement, d’autres l’ont vu au Cambodge, à Moscou, au Liban, d’autres affirment l’avoir vu à Paris. Quant à Vergès lui-même, il indique avoir vécu en France. Il ajoute : « Quand on vit dans la clandestinité, on est obligé de couper tous les liens. » Pour l’écrivain et journaliste Lionel Duroy, Vergès « est devenu avocat par accident ». Le tribunal « était le seul endroit où il pouvait avoir une tribune. II a fini par ne plus avoir d’espoir en politique. II n’aime pas ce que faisait le président algérien Ahmed Ben Bella. II a senti que l’Algérie était ingrate envers lui. Après l’indépendance, il est réduit à être l’avocat des divorces. II aurait pu être un penseur. Et il aime trop la vie pour être terroriste ». Jacques Vergès a associé son nom à des procès qui ont suscité beaucoup de tapage médiatique. En effet, il est l’avocat entre autres du nazi Klaus Barbie, surnommé le « boucher de Lyon ».

II défend Mahab Souleiman, membre du FPLP arrêté à la suite d’une attaque à la grenade et à la mitraillette sur l’aéroport d’Athènes le 26 décembre 1968 contre un avion de la compagnie El Al. II est aux côtés de Anis Naccache qui a pris part à l’opération de prise d’otages au siège de l’OPEP en 1975. Comme il était chargé par la suite de tuer Shapour Bakhtiar, un ancien ministre du Shah d’Iran. L’opération échoue. Naccache est arrêté et condamné le 10 mai 1982 à la réclusion criminelle, puis libéré le 27 juillet 1990. II défend aussi Magdalena Kopp arrêtée en février en compagnie de Bruno Bréguet en 1982 dans le parking des Champs Elysées avec une voiture remplie d’explosifs.

Condamnée à cinq ans de prison, elle est libérée le 4 mai 1985. Vergès rejoint l’avocat Oussedik pour défendre Carlos, condamné à perpétuité en France. Mais derrière toutes ses plaidoiries, Vergès ne cherche-t-il pas à mettre à nu une justice sélective, qui consiste à condamner des criminels et à fermer les yeux sur d’autres ? Les auteurs des crimes contre l’humanité commis dans les anciennes colonies françaises seront-ils un jour jugés ? Pour Vergès, les crimes nazis sont aussi inhumains que les crimes subis par les anciens pays colonisés et les moyens utilisés par les uns et les autres sont les mêmes. Pour des témoins, les sévices commis par la France dans ses anciennes colonies ont influé sur sa conception de la justice. Et quand la politique se mêle de la justice, raison du plus fort, raison de l’Etat oblige, les tragédies sont banalisées. Notons que le film a été projeté aussi jeudi dernier à la salle Ibn Zeydoun à Alger en présence de Vergès.

Amnay Idir

Article 13 de la loi du 23 février : La caution de la France politique à l’OAS dénoncée

octobre 27th, 2007

Les vieux démons de la France coloniale continueront à visiter la France d’aujourd’hui tant qu’elle refusera de les regarder en face.

L’écrivain Jean Philippe Ould Aoudia exige de la France officielle non seulement de regarder ses vieux démons, mais surtout de ne pas les glorifier. Auteur du livre La bataille de Marignane, Jean Philippe Ould Aoudia fustige « la caution du pouvoir politique apportée aux nostalgiques de la période coloniale ».

Faisant le parallèle avec la commémoration de l’exécution du résistant français Guy Môquet par les nazis, l’écrivain français plaide pour une dénonciation des crimes commis par l’OAS. Jean Philippe Ould Aoudia, soutenu par un collectif d’associations, d’historiens, d’écrivains et de politiques français, conteste la présence actuelle des membres de l’organisation terroriste au cœur de la République française.

Il estime dans un communiqué que « le souvenir du sacrifice de Guy Môquet serait moins ambigu si par ailleurs le pouvoir politique n’apportait pas sa caution aux nostalgiques de la période coloniale qui honorent et justifient aujourd’hui les crimes commis par l’OAS ». L’intellectuel français, dont le père fut assassiné avec cinq de ses collègues et l’écrivain algérien Mouloud Feraoun en 1962 dans les locaux des centres sociaux éducatifs, dénonce l’érection de stèles commémoratives en l’honneur des assassins membres de l’OAS.

Ould Aoudia évoque Mouloud Feraoun, dont il dit que la « féroce bêtise a assassiné froidement et délibérément ». Les membres du collectif condamnent l’article 13 du 23 février 2005 indemnisant les membres de l’OAS. L’abrogation de l’article 4 de cette même loi glorifiant le colonialisme n’est qu’une goutte d’eau dans le marécage de l’apologie de la colonisation. Le même collectif, qui compte parmi ses membres les amis des éditions Tirésias et mémoires partagées, la ligue des droits de l’homme et le mouvement contre le racisme, estime que « le refoulé de la guerre d’Algérie donne lieu aujourd’hui à un conflit des mémoires, et les fils de victimes de l’OAS réclament ici que justice soit rendue à leur mémoire ».

Michel Reynaud, directeur des éditions Tirésias, considère que la France « doit régler son compte à son histoire, sinon on ne s’en sortira jamais, notamment face à ces renégats, ces assassins de l’OAS ». Le sénateur Jean Pierre Michel, qui dénonce aussi la folie meurtrière de l’OAS, estime pour sa part que la France « n’est pas encore prête à reconnaître tous les crimes coloniaux ».

Nadjia Bouaricha

Ouyahia critique les actions du gouvernement : « Les lobbys mettent le feu au pays »

octobre 27th, 2007

L’ancien chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, invité de la radio Chaîne II, s’est fait un point d’honneur jeudi dernier pour commenter le retour par l’actuel gouvernement sur certaines de ses décisions, notamment la circulaire sur l’émission des chèques à partir de 50 000 DA ou encore l’interdiction aux entreprises publiques de déposer leur argent dans les banques privées.

Tout en disant respecter le choix du gouvernement, M. Ouyahia démontera en usant d’arguments certaines orientations prises par M. Belkhadem sur le plan économique qu’il accusera d’ailleurs mais d’une manière indirecte de faire du « populisme ». Le secrétaire général du RND affirme de prime abord en réponse aux critiques de certains que ce qu’on dit être « ses décisions » avaient été signées au nom de l’Exécutif. La personnalisation des choses a une certaine signification », a-t-il noté. Et d’ajouter : « Je ne suis pas un mendiant qui fait les choses pour lui-même, j’exécute les décisions d’un Exécutif. » Cette précision n’empêchera pas l’homme politique d’assumer ses décisions et de mettre en doute leur annulation.

« Outre la loi sur l’interdiction du recours des entreprises publiques aux banques privées, j’avais signé aussi l’interdiction du recours aux capitaux étrangers afin de mettre fin à l’endettement. Il y avait à l’époque une catastrophe généralisée dont vous ne connaissez que l’épisode Khalifa. Ces décisions avaient un rôle préventif. Peut-être que les conditions sont aujourd’hui un peu meilleures, mais on verra bien », dira l’invité de la radio en émettant des doutes sur les promesses de lendemains florissants et d’un climat économique nouveau ayant accompagné la déclaration de l’annulation de la circulaire Ouyahia. « J’ai des commentaires sur la manière dont on présente les choses, notamment de la part de certaines personnes qui ne sont pas nécessairement dans le gouvernement », souligne M. Ouyahia en notant qu’il y a quatre vérités à dire.

« En 2001, soit trois ans avant la décision que j’ai signée, le montant des fonds déposés dans les banques privées ne dépassait pas les 10%. Les banques étrangères à l’époque n’avaient pas plus d’une agence en Algérie, c’est dire qu’elles ne fournissaient aucun effort pour accompagner l’investissement. Aucune banque étrangère n’accompagne l’investissement, elles financent l’import-import pour encourager l’économie de leur pays. Après la décision du gouvernement en 2004, que ce soit BNP, Société Générale ou autre, elles ont toutes ouvert entre 30 et 40 agences », explique l’ex-chef du gouvernement pour défendre sa décision.
« Le CPA sera une banque mixte et pas privée »

A la justification par le gouvernement Belkhadem de l’annulation de la circulaire pour la facilitation de la privatisation du CPA, Ouyahia précisera que la privatisation du CPA n’en est pas une puisque « seuls 51% de cette banque iront au privé contre 49% pour l’Etat, il s’agira donc d’une banque mixte et pas d’une banque privée ». Revenant sur sa circulaire concernant l’émission de chèques à partir du seuil de 50 000 DA, Ouyahia explique que cette décision avait été prise sur la base d’une loi qui existe toujours. « Aujourd’hui, on annule la circulaire alors que la loi existe, et on continue à pleurer sur la fraude fiscale et le marché et l’économie parallèles.

Je ne pense pas que cette décision va aider à combattre ces fléaux », dira l’homme politique et SG du RND. Interrogé sur la décision concernant l’augmentation du capital des entreprises importatrices prise aussi par le gouvernement Belkhadem, Ouyahia répondra : « Les lobbys sont trop nombreux dans ce pays et activent dans le but de détruire l’économie nationale. Nous sommes le seul pays au monde qui dit avoir 22 000 importateurs, soit un importateur pour 1500 Algériens ; je ne pense pas que ce soit une situation normale. Laisser faire une opération où l’on fait entrer trois conteneurs sans laisser aucune trace, je ne pense pas que ce soit cela faire du commerce et encore moins de l’économie. »

Le réquisitoire contre les récentes décisions gouvernementales ne s’est pas arrêté en si bon chemin. Ahmed Ouyahia estime que la gestion des affaires publiques n’est pas souvent le fruit « du bon sens ». Il citera à ce titre l’augmentation des salaires pour soutenir le pouvoir d’achat. « On ne combat pas le secteur informel en faisant un pas en avant et deux pas en arrière. Le populisme a une facture. D’accord pour l’augmentation des salaires, mais en prenant en considération la croissance et l’inflation. Sinon fatalement les prix sur le marché connaîtront des hausses », a indiqué le SG du RND en prenant l’exemple des hausses intervenues sur le marché du blé, du lait et de la pomme de terre.

« Il ne faut pas non plus oublier que des lobbys travaillent à mettre le feu au pays. Il n’y a qu’à voir la question de la pomme de terre, où plus de la moitié des importateurs sont des trafiquants et leur marchandise le prouve. » Le même responsable estime qu’il faut travailler à diminuer la dépendance du marché national du marché extérieur. « Un peu de bon sens et de logique ne feront pas de mal à l’Algérie. » Et d’ajouter : « On a enlevé la circulaire sur les chèques bancaires qu’on n’avait pas appliquée, puis on est revenu sur la décision sur l’extraction du sable qu’on prolongera de deux années supplémentaires. Je ne pense pas qu’on puisse mener la bataille contre la violation de la loi en mettant un pas en avant et deux en arrière. » Ce qu’il faut, dira Ouyahia, c’est appliquer la loi et en finir avec « la république des salons et la république des lobbys ». Ceci en fustigeant aussi la récente décision du ministère du Commerce sur l’importation des véhicules : « Il y a un manque d’effort de réflexion à ce sujet. On pense plus à servir les intérêts de Peugeot et de Toyota. »

Nadjia Bouaricha

DEVANT LE MANQUE D’INTÉRÊT DES TÉLÉSPECTATEURS : L’ENTV tente d’innover à travers une nouvelle grille des programmes

octobre 27th, 2007

La nouvelle grille des programmes de la télévision algérienne a été présentée, hier, lors d’une conférence de presse animée par le directeur général de l’ENTV, Hamraoui Habib-Chaouki.

F. Zohra B. - Alger (Le Soir) - Les responsables de l’ENTV qualifient la nouvelle grille de différente par rapport aux précédentes. Ceci, précisera le premier responsable de la télévision algérienne «pour satisfaire au maximum les demandes des téléspectateurs». Demandes qui toutefois restent difficiles à cerner en raison notamment de l’absence de sondages qui permettrait de connaître avec le plus de précision possible les goûts et besoins des Algériens en matière de programmes télévisés.

Concernant ce dernier point, Hamraoui Habib Chaouki, tout en déplorant l’absence de moyens d’évaluation de l’audience, précisera que la chaîne de télévision ne peut qu’attendre la promulgation de la loi sur les sondages, tout en essayant de produire, entre-temps, en récoltant un maximum d’informations sur les échos émanant des téléspectateurs. «La télévision algérienne et plus spécialement la chaîne terrestre, précise le directeur des programmes, se trouve depuis un certain temps et malgré tous les efforts consentis, dans une position très difficile pour pouvoir affronter la concurrence imposée par les innombrables chaînes satellitaires territoire, technologie et pouvoir de l’argent obligent».

L’intervenant expliquera aussi le changement de tendance et de politique d’antenne notamment par le fait que «la chaîne nationale suscite chez le téléspectateur un grand sentiment de frustration et ce, bien qu’il soit porté viscéralement à regarder sa propre chaîne». Le choix, cette année donc, pour les responsables de l’ENTV s’est porté sur la proximité. Le divertissement sera relégué au second plan par rapport aux préoccupations de la société «en vue d’offrir plus d’espaces aux vraies préoccupations des citoyens», explique l’intervenant.

L’information sera également présente «à travers en plus des journaux télévisés qui seront rénovés, plus de professionnalisme et d’originalité, mais également à travers des émissions interactives et des débats…», explique le communiqué de l’ENTV. Les responsables de cette chaîne disent, également, avoir opté dans la nouvelle grille pour de nouveaux programmes tels que les «shorts», les magazines, les grands reportages et les débats.

Un véritable lifting est prévu notamment pour le magazine «Télé matin» aussi bien dans son contenu que dans son rythme de déroulement, précise le communiqué de l’ENTV. Deux nouvelles émissions sont également, au programme pour la fin de matinée : l’une traitant du monde de l’enfant et l’autre de celui de la famille en général. Pour ce qui est de l’émission Chabab» dont les phases éliminatoires se sont achevées le 18 octobre dernier, elle rentrera dans sa phase finale à partir du 25 octobre pour s’étaler jusqu’au 31 décembre 2007.

Durant cette période, l’émission sera programmée à raison de cinq fois par semaine dont quatre parties de 26 minutes chacune seront diffusées en «access prime time» les samedi, dimanche et mercredi et les émissions de prime version 120 minutes sont programmées tous les jeudis. Concernant le projet de la nouvelle chaîne d’information, le directeur général de l’ENTV précisera que le ministre de la Communication se prononcera sur cette question dans les prochains jours.

F. Z. B.

Elections locales du 29 novembre : Un tremplin pour 2009…

octobre 27th, 2007

Les observateurs et autres acteurs politiques à la faveur des polémiques et pugilats en cours, en perspective des élections du 29 novembre, commencent par en situer les enjeux bien au-delà de la seule bataille électorale des Locales.

Des tentatives d’analyses qu’offre par excellence la crise actuelle au sein du FLN. Que des segments entiers et jusqu’aux plus hautes autorités du parti soient en ces moments précis, remontés contre le secrétaire général ne demandant pas moins que ” sa tête “, serait un élément qui remet à l’honneur la sourde controverse autour de la révision constitutionnelle et partant, la non moins subtile ” guerre de succession ” en perspective des Présidentielles de 2009.

Abdelaziz Belkhadem, qui - plus que sa formation - incarne ce projet n’aurait, à tout le moins, une bien moindre influence pour continuer à le faire valoir s’il venait à être écarté des centres de décisions du vieux parti.

Cela si l’on suppose surtout, comme l’affirment - presque - des sources médiatiques, qu’à la pointe de l’offensive anti-Belkhadem se distingue les partisans de l’ex-Premier ministre Ali Benflis, dont on se souvient qu’il avait croisé le fer avec le chef de l’Etat, en prévision des Présidentielles de 2004.

Une donne qui amènerait à penser à un remake du scénario d’il y a trois ans ? On le supposerait, n’était cet autre élément qui a priori contrarierait cette hypothèse.

A savoir, qu’à l’encontre du secrétaire général du FLN, seraient également mobilisés les ” ex-redresseurs ” qui avaient précipité la chute des ” benflisistes “.

Ce qui explique la réalité de l’isolement dans lequel se trouve Belkhadem, duquel se démarquent jusqu’à ses ministres. A ce titre un confrère assure que ne ” s’affichent ” avec lui les seuls ministres de l’Agriculture et que de la Solidarité nationale.

A moins que l’état des politiques d’alliances, des uns et des autres, soit de la même teneur qu’en 2004, mais que ceux, hier, liés à Belkhadem, ne le pourraient plus aujourd’hui, ou du moins, observent une prudence à son endroit.

Cela dans le sens où tout en étant alignés sur les mêmes principes ” pro-présidentiels “, contrairement aux partisans de Benflis, les premiers semblent réticents quant à assumer certaines grosses bourdes présumées du SG.

Son alliance très contestée, qualifiée d’incompréhensible, avec un Saïdani, la débâcle dans la confection des listes des candidatures, le tout sur fond d’une gestion gouvernementale très critiquée…Autant de reproches faits à Abdelaziz Belkhadem et qui si ils venaient à s’exacerber, pourraient lui faire subir le sort du bouc émissaire et/ou fusible tout désigné aux yeux de ceux de “son bord”.

Ils s’en débarrasseraient d’autant plus volontiers, qu’ils ne le laisseraient pas de par sa position actuelle laiser prendre l’avantage aux courants adverses…

La presse n’est d’ailleurs pas la seule à fournir ce type de grille de lecture, à la lumière du bouillonnement en général qui caractérise la scène politico-électorale. Des responsables de partis politiques s’y mettent, eux aussi.

Ainsi, le premier secrétaire national du FFS lors de sa contre-offensive à l’endroit du ministre de l’Intérieur, ce mercredi, a sans ambages, situé le clash entre sa formation - et d’autres-, et l’Intérieur en tant que manœuvre qui préparerait les Présidentielles de 2009.

Karim Tabou, a en effet accusé le premier responsable de l’Intérieur d’œuvrer à ” mettre en place une nouvelle géopolitique électorale qui s’explique par le rejet des listes APC et APW dans les wilayas stratégiques dans la perspective d’une guerre de succession… “.

Ouyahia, le patron du RND, a quant à lui, sur les ondes de la Radio nationale, ce jeudi, abondé dans un très virulent réquisitoire aux sujet des orientations et gestion du chef du gouvernement, ce qui donne d’ores et déjà matière à beaucoup d’y voir une opportunité de l’ex-chef de l’Exécutif d’espérer avec d’autant plus de raisons aujourd’hui d’avoir sa revanche, lui dont on se souvient dans quelles circonstances il avait été ” remplacé “, par son rival du FLN.

Reste à savoir si l’attitude oppositionnelle d’Ouyahia à l’endroit du Chef du gouvernement, mais aussi et surtout de sa gestion, ne vise pas plus que la chefferie du gouvernement ou si elle s’inscrit à plus long terme comme de nombreux observateurs le prédisent depuis quelques temps déjà ?

Hakim Outoudert

Tentative d’émigration clandestine à Annaba : 27 harraga interceptés hier

octobre 27th, 2007

Quelques jours seulement après le discours du président de la République sur l’échec de la politique nationale en direction de la jeunesse, au cours duquel il a stigmatisé les jeunes harraga, les mettant sur un pied d’égalité avec les kamikazes, les candidats à l’émigration clandestine continuent à défier la mer pour rejoindre l’Europe.

Ils sont 27 à avoir échoué dans leur tentative de quitter le pays. Ils ont été interceptés hier à Annaba et El Kala par les gardes-côtes algériens. Ainsi, dans la matinée d’hier, les éléments des gardes-côtes des eaux territoriales de Annaba ont intercepté une embarcation à bord de laquelle ont pris place 15 jeunes harraga. Ils sont venus d’Alger, d’Oran, de Guelma et de Annaba pour tenter de rejoindre les côtes italiennes, notamment l’île de Sardaigne. Agissant sur informations, une unité de la garde maritime est intervenue à 20 miles au nord-est de Ras El Hamra et a réussi à mettre fin à leur « rêve ». Agés entre 17 et 37 ans, ces jeunes ont embarqué la veille à partir de la plage de Seybouse.

Il y avait parmi eux plusieurs universitaires et étudiants, qui, sans espoir de bâtir leur avenir en Algérie, ont tenté le risque mortel de l’aventure. Après une visite médicale, ils ont passé la nuit dans les locaux des gardes maritimes pour être présentés, aujourd’hui, devant le procureur près le tribunal de Annaba. Il faut dire que cette dernière est devenue une plaque tournante en matière de harga, où un véritable réseau s’est installé et dont les ramifications s’étalent aux quatre coins du pays. Rappelons que cette interception intervient après plusieurs semaines d’accalmie durant lesquelles les gardes-côtes de Annaba n’en ont enregistré aucune. « C’est suite à un draconien dispositif de sécurité que les tentatives d’émigration clandestine ont connu une baisse sensible », dira M. Cheriak, officier supérieur de la marine de Annaba.

Par ailleurs, douze personnes âgées entre 25 et 42 ans ont été interceptées par les gardes-côtes d’El Kala vendredi à 3h à cap Rosa, 25 km à l’ouest d’El Kala. Les harraga étaient à bord d’une embarcation à fond plat d’à peine 4 m propulsée par un moteur hors-bord. Ils avaient quitté Chapuis (la plage de Rizi Amor d’Annaba) quelques heures auparavant avec des candidats à l’émigration venant de l’Est mais aussi de la région d’Alger. Les harraga ont été repérés par les gardes-côtes qui leur ont donné la chasse en les rabattant vers le rivage.

M. F. G.

S. S.

Faut-il fermer les cliniques privées ?

octobre 25th, 2007

Les cliniques privées sont dans le collimateur du ministère de la Santé qui vient de faire un constat amer en matière du fonctionnement et de l’organisation des activités au sein de ces structures.

Alors qu’un avant-projet de loi visant à mettre les cliniques privées sous tutelle publique est élaboré, des enquêtes menées sur le terrain par des praticiens inspecteurs ont constaté des “dérives” et des “dysfonctionnements” absolument graves.

Dans une correspondance de la tutelle du 24 septembre dernier adressée aux walis et directeurs de la Santé et de la population des wilayas et relative à l’organisation des activités dans le secteur privé de la santé il est souligné que suite aux “différents contrôles menés dans ces structures, il a été constaté des infractions liées aux conditions de fonctionnement ainsi que des pratiques perverses en matière d’exercice de l’activité complémentaire”.

Cette dernière activité, instaurée en 1998 est qualifiée de “source de beaucoup de dérives dans son application”, suite au “laxisme” des gestionnaires dans le contrôle de l’exercice de cette activité.

Le ministre qui rassure que le principe de cette activité “n’est pas remis en cause, mais vient même d’être consacré par l’ordonnance portant statut général de la fonction publique”, ajoute par ailleurs que ces effets pervers relevés ne seront plus tolérés et c’est là la tâche à laquelle s’attelle actuellement le ministère chargé de la santé avec le concours du conseil de déontologie médical pour contribuer à la moralisation de la profession.

Le ministre de la Santé n’a pas épargné les praticiens spécialistes du secteur privé conventionnés avec le secteur public en les accusant de plusieurs dérives.

“Certains médecins spécialistes du secteur privé conventionnés avec le secteur public n’hésitent pas à évacuer délibérément des malades qu’ils sont censés soigner dans le secteur public avec lequel ils sont conventionnés vers leurs structures privées d’attachement, plus grave encore, ils vont jusqu’à les ré- évacuer vers les structures publiques en cas de complications graves allant jusqu’au décès du malade”.

Le réquisitoire ne s’arrête pas là puisque l’on parle aussi de “malades traités illégalement par des spécialistes du secteur publique de la santé au profit occulte de certains structures privées, malades qui leur sont orientés, par ces derniers, en leur fournissant des soins et des produits pharmaceutiques gratuitement”.

Outre les réseaux croisés de trafic de malades entre hôpitaux publics et cliniques privées, les contrôles effectués par la tutelle ont relevé que des interventions chirurgicales dans beaucoup de cliniques privées “sont réalisées sans traçabilité ; pas de protocoles opératoires”.

Pour bannir toutes ces pratiques dont les malades sont les premiers à payer la facture, de nouvelles dispositions visant à remettre de l’ordre dans ces structures privées sont déjà tracées par la tutelle qui menace que toute infraction fera l’objet de sanctions allant jusqu’a là fermeture de la structure.

Parmi ces dispositions, il est noté que toute clinique doit assurer un service permanent et continu et se doter d’un règlement intérieur.

Aussi, les recrutements des personnels doivent se faire dans la légalité et la liste des employés, accompagnée de diplômes et titres, doit être disponible au niveau de la Direction de santé de wilaya.

Chaque malade admis est mentionné sur un registre des entrées et des sorties et doit disposer d’un dossier médical complet.

Outre ces mesures de contrôle direct des cliniques privées par les autorités sanitaires, de nouvelles règles touchent les spécialistes du secteur public exerçant l’activité complémentaire en les sommant de remettre à leurs administrations respectives l’emploi du temps de leurs activités hospitalières.

Tout compte fait, ces nouvelles mesures du premier responsable du secteur de la santé vont peut être mettre fin à l’anarchie qui règne dans les cliniques privées à condition qu’elles ne connaitront pas le même sort que les directives relatives à la restauration et à l’hébergement des malades.

Nadir Touati

Les médecins-patrons ne se laisseront pas faire

Le docteur Abdelhamid Mohdeb, investisseur privé dans le secteur de la santé, dont la clinique est implantée en plein cœur du quartier populaire d’Iheddaden, à Béjaïa, fulmine contre l’avant-projet de loi modifiant et compétant la loi 85-05 du 16 février 1989 relative à la protection et à la promotion de la santé. Pour rappel, ledit projet de loi, examiné et endossé récemment par le conseil du gouvernement, prévoit de confier la présidence du conseil d’administration des établissements et cliniques privés à un représentant du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière.

Dans une rétrospective retraçant le “parcours parsemé d’embûches” auquel ont fait face les opérateurs privés avant que leurs projets ne se concrétisent, le docteur Mohdeb et, pour illustrer son propos, dira qu”’il lui a fallu deux ans d’attente pour se voir délivrer un agrément et plus d’une année et demie avant d’être conventionné par la CNAS”.

Par conséquent, il s’interroge, “comment, aujourd’hui pourrait- on prétendre confisquer le droit de décision aux opérateurs privés ?”.

Le docteur Mohdeb va encore plus loin en déclarant qu’il est inacceptable d’abdiquer devant pareille injonction quoi qu’il en coûte.

Abordant la situation qui prévaut au sein des structures hospitalières publiques, le docteur Mohdeb, tout en insistant sur les réelles motivations de l’opérateur privé “d’aider et d’investir», a relevé que “celles-ci sont dans un état de délabrement” et par ricochet “en passe de répondre d’une manière efficiente à une demande de plus en plus accrue et exigeante”.

Pour le docteur Mohdeb, la démarche du ministère ne serait qu’une tentative de mise à mort des cliniques privées. Car, à ses yeux, “le processus est d’ores et déjà en branle”. Sinon, s’interroge-t-il, “comment expliquer la saignée constatée ces jours-ci au sein des cliniques privées ?”. “Des infirmiers, du moins dans ma clinique, ont été rendus destinataires de convocations les invitant à intégrer le secteur public”. tient-il à souligner. Lesquelles convocations, “sont malveillantes, car visant de prime abord, à vider les cliniques et les établissements privés de leur matière grise, sachant que le corps paramédical souffre d’un énorme déficit en nombre d’agents formés en la matière”, s’indiqne-t-il.

Ne s’offusquant guère à l’idée d’évoquer les reproches formulés par le ministère de la Santé à l’endroit des cliniques privées, le docteur Mohdeb reconnait que “des malversations et des pratiques illégales existent bel et bien”, mais il tient à préciser, “pas à grande échelle”. A titre d’exemple, il cite “l’avortement” qui, dira-t-il “pourrait se pratiquer de plus belle en violation de la réglementation en vigueur” d’ailleurs, à ses yeux, “il serait le principal grief qui pourrait être retenu contre les opérateurs privés.”

Faut-il également rappeler que l’avant-projet de loi en question, accorde aux cliniques privées en exercice un délai de deux années pour se conformer à la nouvelle loi.

Il est aussi prévu que la délivrance des autorisations d’ouvertures des établissements privés n’est plus du ressort des walis comme ce fut le cas par le passé, mais une prérogative du ministère de tutelle.

Outre un représentant du ministère de la Santé qui assurera la présidence du conseil d’administration de la clinique privée, un représentant de la Sécurité sociale, un membre du syndicat de l’établissement, deux représentants des usagers, un représentant des praticiens médicaux et un des personnels paramédicaux y prendront également part. La gestion de l’établissement sera confiée à un directeur technique nommé.

En définitive, si de nouvelles réactions venaient à rallier celle du docteur Mohdeb, l’on s’acheminerait vraisemblablement vers un bras de fer entre le ministère de tutelle et les opérateurs privés dans le secteur de la santé.

Dallil Saïche

Roberto Saviano. Journaliste et écrivain italien condamné à mort pour son livre Gomorra: Dans le viseur de la camorra

octobre 25th, 2007

« Le silence, c’est la mort. Et toi, si tu parles, tu meurs. Si tu te tais, tu meurs. Alors, parle et meurs. » Tahar Djaout

Bien que cette tirade soit vieille de dix-sept ans, on pourrait presque dire que son auteur, l’écrivain et journaliste Tahar Djaout, assassiné par les Groupes islamistes armés (GIA) le 26 mai 1993, l’a spécialement rédigée à l’attention de Roberto Saviano.

Roberto qui ? Journaliste et écrivain d’origine italienne, Roberto Saviano est l’auteur de Gomorra : Dans l’empire de la camorra, un roman enquête sur la camorra, cette redoutable organisation qui a fait du crime son fonds de commerce. Sorti durant le printemps 2006 aux éditions Mandadori (propriété de Silvio Berlusconi), le livre est un best-seller et son auteur n’arrête pas d’enchaîner les passages à la radio et à la télévision. Traduit dans plusieurs langues, il intéresserait même quelques pontes à Hollywood. Mais voilà, Roberto aurait bien aimé se passer d’un tel tapage. Quant au succès de son roman, il incommode Roberto plus qu’il ne le comble de bonheur. C’est que cet homme qui a osé décrire les pratiques criminelles de la camorra, cet homme qui a osé balancer publiquement les noms des grands et petits caïds, est désormais condamné à mort.

Aujourd’hui, Roberto Saviano vit comme un ermite entre Naples et Rome. Il ne se déplace que dans une voiture blindée, change régulièrement de domicile, filtre ses appels téléphoniques et a droit à la protection de trois colosses qui veillent sur lui 24 heures sur 24. Même en déplacement à l’étranger, ce jeune homme de 28 ans au crâne rasé, aux yeux ténébreux et au menton aussi sombre qu’une ardoise d’écolier, ne badine pas avec sa sécurité. Lorsqu’il s’est rendu, en septembre, dernier à Paris pour assurer la promotion de Gomorra, (une contraction des mots ghomore et camorra), son éditeur Gallimard a gardé secret le lieu de sa résidence et les journalistes qui souhaitaient interviewer Roberto Saviano ont dû se plier à quelques mesures de sécurité et de discrétion.

Dans la peau d’un condamné à mort

« Je sais que la Camorra n’oublie jamais, explique Roberto. Ils m’ont envoyé plusieurs lettres. Au début des années 90, il y avait une liste de noms qui circulaient. Cela a pris cinq ans, dix ans, tous y sont passés. » Si la Camorra n’oublie jamais, elle ne pardonne pas non plus. Depuis une trentaine d’années, plus 3700 personnes ont trouvé la mort dans le sillage de ce syndicat du crime. Créée à Naples au début du XIXe siècle, la camorra (la protection) compte quelque 7500 initiés qu’on appelle communément camorristes. Trafic de tabac et drogue, en particulier la cocaïne, jeux de hasard, paris clandestins, prostitution, tripots clandestins, extorsion de fonds, contrebande et contrefaçon, détournement de subventions publiques, la pieuvre camorriste étend ses tentacules bien au-delà de l’Italie.

Sa présence et son influence, sa nuisance pardi, touchent également plusieurs pays d’Europe. Contrairement à la cosa nostra, la camorra n’a pas de chef suprême. « C’est une organisation structurée en forme d’étoile, explique Roberto. À la différence de la mafia, elle n’a pas de juge de paix et le clanisme est sa seule religion. » C’est donc les secrets de ce Système (ainsi qu’on appelle l’organisation) de vastes truanderies que Roberto Saviano a entrepris de révéler au grand jour dans ce livre qui s’est déjà écoulé à plus d’un million d’exemplaires. Malheur lui en a pris. On ne touche pas à la camorra sans se brûler les doigts. Mais comment ignorer cette piovra lorsqu’on naît et grandit à Naples ? Car si les mafiosi tiennent la Sicile comme leur Mecque, les camorristes, eux, considèrent Naples comme leur territoire privé.

Bref, une sorte de Medellin à l’italienne.C’est ici donc, précisément à Casal di Principe, que naît, en 1979, Roberto Saviano. Fils d’un médecin urgentiste, il commence à nourrir une fascination pour le Système à l’âge où les pubères scrutent leurs premiers boutons d’acné. « Je suis né dans une terre de camorra, raconte-t-il, dans le lieu d’Europe qui connaît le plus de morts par assassinat, un territoire où la férocité est liée aux affaires, où rien n’a de valeur s’il ne génère du pouvoir. Où tout a la saveur d’une bataille finale. » Alors que ses camarades s’échinent sur les manettes des play-stations, Roberto, lui, écume les scènes de crime. Il raconte : « J’arrivais sur les lieux des crimes. J’étais tétanisé, les pores bouchés, l’estomac contracté, la respiration bloquée par la férocité des assassinats que je voyais. » Cette attirance précoce pour le goût du sang et l’odeur de la mort, très souvent violente, se muera plus tard en une passion dévorante. Tellement dévorante qu’elle causera son malheur.

Un diplôme de philosophie en poche, Roberto intégrera l’Observatoire de la camorra, un organisme de recherche exclusivement dédié à la pègre. Ici, Roberto Saviano se transformera en une sorte d’archiviste du crime, sous toutes ses formes. Avec la méticulosité d’un moine bénédictin, il consignera par écrit tout ce qu’il voit, tout ce qu’il entend, tout ce qu’on lui rapporte à propos de la camorra. En parallèle, il sera collaborateur à l’hebdomadaire L’Expresso, travaillera pour le compte de divers périodiques, signera plusieurs reportages et une fournée d’ouvrage sur le crime organisé. Avant de s’atteler, bien sûr, à la rédaction de son dernier ouvrage. À sa sortie, Gomorra a eu droit à un modeste tirage : tout juste 5000 exemplaires. Certes, le livre a recueilli quelques bonnes critiques dans les journaux, mais ce n’était pas assez, du moins pas suffisant, pour figurer parmi les meilleures ventes dans les librairies. Les ventes décollent vraiment le jour où Roberto repart dans sa ville natale, Casa Del Principe, pour participer à une réunion publique contre la violence.

Nous sommes le samedi 23 septembre 2006. Lorsque l’écrivain prend enfin la parole, il égrène un à un les noms des caïds locaux qui émargent pour le compte du Système. Il y avait là des représentants de la redoutable famille Schiavone, mais aussi Paolo Di Lauro dit « le Millionnaire », Carmina Alfieri, au doux surnom de « l’Enragé », Francesco Savione le sanguinaire ou encore Luigi Giuliano. Mieux, Roberto leur demande de quitter les lieux en les apostrophant ainsi : « Vous ne comptez pour rien. Vous ne valez rien. Eux fondent leur puissance sur la peur que vous inspirez. Eux doivent partir. » Le lendemain, le journal local, Corriera di Caserta, reproduit la liste déclamée la veille par Roberto Saviano.

Le rédacteur de l’article pousse même le sens du détail jusqu’à indiquer qu’un membre des Schiavone notait sur un calepin les noms de toutes les personnes qui applaudissaient Roberto lorsque celui-ci éreintait les parrains napolitains. C’en est trop. Pour la camorra, Roberto Saviano a commis l’irréparable, l’impardonnable. D’abord traité de bouffon, de balance, et même de clown, il sera bientôt harcelé, épié, surveillé et bien sûr, menacé de mort. Evidemment, lui qui connaît trop bien les méthodes des camorristes, ne prend pas ces avertissements à la légère. Dès la mi-octobre 2006 donc, il est mis sous protection policière. C’est que chez la camorra lorsqu’un contrat est lancé sur la tête d’une personne, cela signifie que celle-ci est morte. Peu importe le temps que cela prendra, cinq, dix, quinze, vingt ans, la sentence finira, d’une manière ou d’une autre, par être exécutée. Hélas, la liste des victimes est là pour rappeler que l’organisation tient ses promesses.

Le jeune rédacteur en chef du quotidien El Mattino, Gianfranco Siari, l’a appris à ses dépens. Le 10 juin 1985, le journaliste, spécialiste de la camorra, avait écrit un article sur une affaire impliquant Valentino Gionta et un autre mafieux, du nom de Lorenzo Nuvoletta. Moins de cinq mois plus tard, le 23 septembre, il est assassiné devant son domicile. Le prêtre Don Peppino Diana subira le même sort en 1994. Pour avoir osé organiser une marche anti-camorra, le jeune prélat sera tué le 19 mars de cette année-là dans l’église de Casal di Principe.

LA CAMORRA C’EST UN PEU LE GIA

On ne défie pas impunément la camorra. On ne s’oppose pas aux parrains sans courir le risque de recevoir une balle dans la tête ou en plein cœur. Ainsi, Saviano se souvient d’un sordide fait divers qui s’est déroulé à Naples le 21 janvier 1995. « La tête de la victime est posée sur le siège arrière de sa voiture. L’homme a été décapité avec un couteau dentelé. Les tueurs ont aspergé sa tête d’essence, et l’ont fait exploser. » La camorra, c’est un peu le GIA : elle tue pour punir, exécute pour donner l’exemple et mutile pour frapper les esprits. Extrait du livre : « On a coupé les oreilles qui ont entendu où se cachait le parrain, brisé les poignets et les mains qui ont touché l’argent, énucléé les yeux qui ont vu, arraché la langue qui a parlé. La face défoncée, la face perdue aux yeux du Système, quand un homme a fait ce qu’il a fait.

Les lèvres scellées par la croix ; fermées à tout jamais par ce à quoi on a cru et qu’on a trahi. » Terrifiant ? Il y a pire. Cet autre passage du livre relatif à un secteur, celui de la drogue, qui rapporte aux parrains plus de 500 000 euros de gain par jour, donne encore une autre idée sur l’étendue du registre des camorristes. « Après s’être injecté sa dose d’héroïne, un jeune drogué a commencé à se sentir mal et il est tombé à terre. Le type qui la lui avait vendue, un individu vêtu avec élégance et portant des chaussures de sport de grand luxe, lui a fait un massage cardiaque du pied, sans le toucher, avant de dire dans son téléphone portable : ‘‘il est mort. Faites les doses plus légères’’. »

Mais ne pensez pas que notre homme éprouve des remords ou des regrets, tremble de peur à l’idée de se faire occire ou envisage de tout laisser tomber pour fuir dans un coin reculé du monde. Partir, dit-il, cela voudrait dire leur donner raison. Il conçoit son combat comme acte de résistance. « Les parrains font circuler des menaces et rumeurs pour me démolir, mais tant que je suis au centre de l’attention publique, je n’ai pas peur. Le problème se posera plus tard. J’attends le pire, même si je ne sais pas quel visage il prendra. Plus que les balles, je crains les diffamations qui visent à décrédibiliser mon propos et m’accusent d’avoir tout inventé pour me faire de la publicité ou me garantir une carrière politique. »

Justement, pour ne pas le laisser seul face à ces bourreaux, l’écrivain Umberto Eco a laissé un cri d’alarme : « Ne laissons pas Saviano seul comme nous avons laissé Falcone et Borsalino », s’est exclamé récemment l’auteur du Nom de la Rose. En effet, les deux juges anti mafia avaient été liquidés par cosa nostra. Le premier a péri dans un attentat à la voiture piégée le 23 mai 1992, tandis que le second subira le même châtiment le 19 juillet de la même année. Robert Saviano a-t-il peur de mourir ? Non, il veut juste continuer à vivre et à pouvoir écrire.

- PARCOURS

Titulaire d’une licence en philosophie à l’université de Naples Federico II, où il a été l’élève de l’historien méridionaliste Francesco Barbagallo, Roberto Saviano (né en 1979 à Naples) fait partie d’un groupe de chercheurs de l’Osservatorio sulla Camorra e l’Illegalità et collabore avec l’hebdomadaire L’Espresso. Ses récits et reportages ont été publiés sur Nuovi Argomenti, Lo Straniero, Nazione Indiana, Sud, et sont inclus dans différentes anthologies, dont Best Off, Il meglio delle riviste letterarie italiane (Minimum Fax 2005), et Napoli comincia a Scampia (L’Ancora del Mediterraneo 2005). En 2006, pour son premier roman Gomorra, il reçoit le prix Viareggio, le prix Giancarlo Siani et le prix Stephen Dedalus. Suite à la sortie de ce livre sur la camorra, l’organisation mafieuse napolitaine, Roberto Saviano est menacé de mort et bénéficie d’une protection policière.

Samy Ousi-Ali

La refonte du système éducatif en débat : Les cinq grands défis de l’école

octobre 25th, 2007

C’est une urgence politique. » Aïssa Kadri, directeur de l’Institut Maghreb-Europe, et à ses côtés les meilleurs sociologues de l’éducation, des enseignants et d’autres chercheurs appellent avec force à la réflexion pour un nouveau système éducatif.

Réunis hier à Bouzaréah à l’initiative de l’Association algérienne pour le développement de la recherche en sciences sociales, ils ont échangé leurs points de vue autour du thème « Mondialisation et éducation ». Cette rencontre fut surtout l’occasion de constater l’échec du système éducatif algérien, réformé sans les principaux concernés et sans coordination, et d’appeler à sa refonte, « cruciale pour les générations à venir ». Nous les avons interrogés sur les grands défis que l’école devra relever dans les dix ans à venir. Dans cet énorme chantier, cinq grandes orientations se dégagent.

- Protéger les jeunes générations d’une école calquée sur une société mercantile

Le problème est récurrent dans les pays en voie de développement : sous prétexte d’aller vite, de mettre en place un système qui ne coûte pas cher, les systèmes proposent « un enseignement au rabais », comme le qualifie Mustapha Haddab, professeur spécialiste en sociologie de l’éducation. Ses confrères sont d’accord avec lui : il faut une réflexion globale sur le rôle du système éducatif, sur les valeurs et les représentations qu’il doit transmettre. Que veut-on former : des citoyens ou des consommateurs ? « On croit arriver directement à la modernité sans passer par les étapes intermédiaires qui sont des étapes de culture désintéressée. Il faut que tout soit utilisable ou rentable. Or avec l’éducation, on ne peut pas tricher. » Et Aïssa Kadri d’ajouter : « De toute manière, aucune société ne peut prévoir à vingt ou trente ans quelles seront ses exigences. Les systèmes éducatifs sont ancrés dans l’histoire et vont moins vite que les transformations technologiques. »

- Former le corps enseignant à une vraie culture pédagogique

Quelle doit être la culture de l’enseignant ? Pour l’instant, les experts reconnaissent que la question n’est pas vraiment posée. Une chose semble sûre : la formation professionnelle et le recrutement des enseignants ont aussi, et peut-être même en priorité, besoin d’être revus. Entre autres, relancer la recherche pédagogique au lieu d’appliquer des recettes prescrites ailleurs — le LMD pour ne citer que lui —, car les enseignants ne doivent pas être des transmetteurs de savoir automatiques. « Cela va prendre du temps, précise Mustapha Haddab. Mais il faut voir la réalité en face : ce ne sont pas dix jours de stage ou des recrutements à partir de la licence qui règlent les problèmes. On a pensé qu’un niveau universitaire suffirait à faire un bon enseignant. Or si c’est nécessaire, ce n’est pas suffisant. Il faut aussi des convictions, une certaine stabilité, une ouverture d’esprit… »

- Faire de l’accès à l’éducation pour tous un réel facteur d’égalité

Pour certains sociologues comme Aïssa Kadri, le développement de la scolarisation a permis de cacher les vrais problèmes, les statistiques servant à valoriser l’aspect quantitatif au détriment de l’aspect qualitatif de l’enseignement. « C’est particulièrement criant pour le taux de réussite au bac, illustre-t-il. De 68% dans les années 1970, il a baissé à 25% dans les années 1980 pour remonter à 50%. On fait une fixation sur les taux mais on ne se demande pas si les savoirs exigés pour accéder à l’enseignement supérieur sont de bonne qualité. C’est la même chose pour le taux de féminisation. Certes, il est de plus 60% à l’université mais parce que les femmes s’y trouvent reléguées. La preuve : le taux d’activité féminine en Algérie est un des plus bas du Maghreb ! » Autre constat : moins de 30% d’une classe d’âge passent le bac et plus de 500 000 jeunes sortent de l’école avant l’épreuve sans savoir ce qu’ils deviennent. Conclusion : l’accès à l’éducation doit renouer avec son rôle premier, le gommage des inégalités.

- Faire de l’arabe une véritable langue d’enseignement

La réforme a introduit le recours à la symbolique universelle (opération écrite de droite à gauche) dans les disciplines scientifiques (maths, physique) de sorte que même si l’enseignement est fait en arabe, les élèves ne seront pas déphasés dans le cadre d’une société mondialisée. Problème : le hiatus demeure pour les sciences humaines, enseignées en arabe jusqu’au bac, puis en français à l’université. « C’est un souci majeur, admet un chercheur, que la réforme compte résoudre en formant convenablement l’élève dans toutes les matières, notamment en développant un esprit critique… de sorte à ce qu’il puisse suivre un cursus spécialisé en français. » Pour Aïssa Kadri, le problème vient surtout de la capacité de la langue à évoluer, à accepter les mots extérieurs et à résister à la tentation actuelle de la sacraliser. Finalement, ce n’est pas la langue qui est incriminée mais les conditions sociopédagogiques dans laquelle elle est enseignée.

- Désidéologiser les contenus de l’enseignement

« En Algérie, le système éducatif remplit une fonction de contrôle politique et idéologique, remarque Aïssa Kadri. Pourquoi ? Parce qu’à la base, les porteurs du projet d’arabisation ont été formés dans des établissements traditionnels, par des gens formatés, nostalgiques de Médine, à la pensée conservatrice. » Mustapha Haddab partage le même avis : « Il n’y a aucun consensus sur les contenus, décidés uniquement sur des considérations d’ordre idéologique et culturel. » Le défi : laisser plus de place à la tolérance et à la diversité, en enseignant, par exemple, toutes les religions. « Le Liban, et en partie l’Egypte, y sont bien arrivés… », conclut Aïssa Kadri.

Chronologie d’une faillite

- 1962-1976. Le système éducatif reproduit le modèle français. Porté par la coopération, il ne concerne que la petite bourgeoisie. Aujourd’hui, le pays tient essentiellement avec les cadres de cette génération.

- 1976-1988. La scolarisation se développe, touchant surtout les classes populaires. Pour certains sociologues, cette massification masque de graves dysfonctionnements.

- 1988-2007. Le système éducatif s’érode. Les experts relèvent une désaffection pour les études. Les valeurs de la société - gain facile, non-valorisation du travail, monnayage des diplômes - ont infiltré le système scolaire.

Propos :

La réforme du français de 2003 est-elle un exemple à suivre ?

- Fatma Ferhani, ancienne inspectrice de l’éducation, chercheur en didactique des langues « Si l’on regarde les textes, oui. D’abord, ils prévoient que l’apprentissage du français commence plus tôt, en troisième année au lieu de la quatrième. Ensuite, les programmes sont bâtis sur des compétences à maîtriser. En clair : on ne demande plus à l’élève de reproduire des modèles, on lui fait faire les choses. Cette politique induit donc une nouvelle méthode d’apprentissage. Il est par exemple demandé à l’élève de travailler en dehors de la classe : en lisant ou en faisant des recherches sur internet. Enfin, les textes ont aussi repensé les manuels, où sont abandonnés les extraits d’œuvres au profit de textes longs (comme des nouvelles complètes d’auteurs de tous les pays). Les textes sont donc porteurs d’espoir et de développement. Il y est dit : ‘’Une langue maîtrisée est un atout pour la réussite professionnelle et le moyen de connaître l’autre à travers une réflexion sur l’identité/altérité’’. Reste à voir l’application qui en est faite sur le terrain… »

« Attention aux critiques trop faciles »

- Mustapha Haddab, professeur spécialiste en sociologie de l’éducation « On incrimine parfois un peu rapidement le système éducatif. Il est par exemple facile de dire que les manuels scolaires sont mauvais mais il existe des ouvrages parascolaires de très bonne qualité. Le système n’est pas complètement inopérant : il y a aujourd’hui suffisamment d’établissements, le programme de maths pour le secondaire est solide et conséquent, et quand on regarde les produits de l’école, il est possible de réussir. Certains s’en sortent brillamment. Bref, on met beaucoup de choses sur le dos de l’éducation, mais tout ne relève pas de sa responsabilité. Exemple : le chômage intellectuel existe, aussi le résultat de l’absence de dynamique économique. »

Cinq propositions pour l’avenir

- Aïssa Kadri, directeur de l’Institut Maghreb-Europe (Paris) :
- Mettre en place des états généraux de l’éducation impliquant tous les acteurs : professionnels de l’enseignement, mais aussi associations de parents d’élèves, partis politiques…
- Créer un observatoire de l’éducation qui développe des outils statistiques fiables.
- Repenser les instituts de formation des enseignants et leur recrutement.
- Créer des pôles universitaires en fonction des besoins locaux. Actuellement, 17 universités de l’est proposent du droit. Spécialisons plutôt l’université d’Annaba sur l’environnement, celle d’Adrar sur l’Afrique, celle de Khenchela sur l’histoire du patrimoine, etc.
- Cibler des espaces prioritaires d’éducation. Un peu comme l’ont été pensées les zones d’éducation prioritaire en France dans les années 1980. En zone rurale, investir financièrement et humainement (enseignants, personnel de santé) sur des établissements pilotes.

Mélanie Matarese

Concours d’architecture de la grande mosquée d’Alger : Cinq offres financières retenues

octobre 25th, 2007

Le bureau d’études le moins disant pour l’étude de ce projet est l’iranien Asar Genidar dont l’offre financière est de 5,9 millions d’euros (près de 600 millions de dinars) avec un délai de 12 mois. La commission d’évaluation chargée du suivi de la réalisation de la grande mosquée d’Alger annoncera aujourd’hui le nom du bureau d’études retenu.

L’ouverture des plis financiers du concours d’architecture pour la réalisation de la grande mosquée d’Alger a donné lieu, hier à Alger, à un classement provisoire des cinq soumissionnaires, parmi 17 bureaux d’études qui ont soumissionné pour l’étude et le suivi du projet, en attendant que la commission d’évaluation se prononce officiellement, probablement aujourd’hui.

A priori, le bureau d’études le moins disant pour l’étude de ce projet est l’iranien Asar Genidar dont l’offre financière est de 5,9 millions d’euros (près de 600 millions de dinars) avec un délai de 12 mois. Cette offre est suivie par celle du bureau franco-britannique ATSP/Atkins avec 2,9 milliards de dinars pour un délai de 10 mois, puis par l’offre du bureau germano-tunisien Société Krebs Kiefef avec 3,5 milliards de dinars pour un délai de 27 mois.

Les deux bureaux d’études restants, le français As Architecture Studio et l’allemand Iproplan, ont fait une offre respectivement de 4,7 milliards de dinars (avec un délai de 17 mois et demi) et 12,9 milliards de dinars avec un délai de 11 à 12 mois). Il y a lieu de préciser à cet effet que le choix de la commission d’évaluation se fera sur la base d’un barème à partir duquel les soumissionnaires seront notés en fonction de leurs offres techniques et des délais qu’ils proposent.

La prochaine étape consistera à lancer un autre avis d’appel d’offres pour la réalisation du projet après que le bureau d’études retenu ait terminé l’élaboration de tous les plans (60 000 à 70 000 plans). Il est à rappeler que la commission de sélection des offres avait procédé à l’ouverture des plis des offres techniques le 18 septembre dernier, et avait sélectionné, après achèvement de son travail le 4 octobre, 5 bureaux d’études ayant présenté les meilleurs projets.

Par la suite, le président de la République a réuni le 6 octobre les membres du jury composé de responsables de plusieurs secteurs et également d’experts dans le domaine de l’architecture et de l’habitat pour étudier et sélectionner le bureau d’études qui a présenté le meilleur projet parmi les 5. Il s’est également rendu au Palais du peuple pour visiter l’exposition des maquettes de chacun des 17 bureaux d’études ayant soumissionné au projet de la grande mosquée d’Alger. Jusqu’à présent, le nom du lauréat n’est pas encore connu du fait que c’est le président de la République lui-même qui doit choisir le lauréat parmi les 5 retenus.

Lyes Malki