Commémoration d’un bicentenaire : Naissance de l’Emir Abdelkader

décembre 16th, 2007

A l’occasion de la commémoration du bicentenaire de la naissance de l’Emir Abdelkader (1807-2007), Algérie Poste a procédé hier, à la Bibliothèque nationale d’El Hamma (Alger) à l’émission d’un bloc feuillet de trois timbres à l’effigie de cette figure emblématique.

Elle symbolise l’unité nationale dont le leadership était reconnu par la population à travers l’Algérie confrontée à une invasion étrangère. Il sut maintenir cette unité guidé dans le choix de ses collaborateurs originaires de toutes les régions du pays et en fonction des critères d’intégrité et de compétence. Dans une note introductive des journées d’étude sur le « créateur de l’Etat algérien moderne », il est souligné : « c’est grâce à cette cohésion nationale que l’Emir a pu diriger avec succès, comme jadis Jugurtha, une résistance héroïque pendant plus de 15 ans contre un envahisseur dont les effectifs et le matériel de guerre étaient largement supérieurs aux siens ». Mohamed Boutaleb, président de la Fondation Emir Abdelkader, a déclaré : « Ces écrasantes charges pesant pour ses épaules ne l’ont pas empêché de s’adonner au côté spirituel tant dans le domaine des œuvres littéraires, de la poésie où il excellait que plus tard, dans le tassawouf, apport inestimable à la civilisation universelle. » L’Emir est présenté comme un personnage au parcours étonnant, tantôt chevalier intrépide, peu enclin à courber l’échine face à l’adversité, « porteur de foi » ou d’espérance et surtout rassembleur. Boudjemaâ Haïchour, ministre de la Poste et des Technologies de l’information et de la communication, voit en lui « une figure historique à la fois complexe et emblématique ». Cette commémoration est, selon lui, « une escale propice à une plus grande compréhension de l’histoire de notre pays et des hommes, qui en ont constitué les grandes pages. Retracer les moments de l’histoire pour mieux en recouvrer les pages occultées, inconnues ou mal connues est en effet une voie royale pour assumer et comprendre le présent. » Il ne s’agit nullement de passéisme, de culte de la personnalité, d’apologie, de légende dorée ou de regard figé. La recherche a pour tâche de retrouver sereinement les traces, le contexte et le sens des événements et des personnalités qui ont fait l’histoire, pour permettre leur compréhension, afin de favoriser toutes les formes de réconciliation et de progrès. Ghania Houadria, directrice générale d’Algérie Poste écrit : « Naturellement, Algérie Poste émet un timbre-poste commémoratif du bicentenaire de l’Emir Abdelkader, perpétuant ainsi, par le timbre, une mémoire que l’histoire, par la force des choses, a déjà immortalisée et qui continue aujourd’hui encore d’inspirer les artisans de la construction de l’Algérie. » Ce bicentenaire se veut aussi une manière de lire l’histoire au-delà de la désinformation des uns et les attitudes de repli des autres. L’Emir était un homme de paix contraint à la guerre et non un guerrier.

Kamel Benelkadi

Autorité de régulation de la poste et des télécommunications : Nouveau plan de numérotation téléphonique

décembre 16th, 2007

L’Autorité de régulation de la Poste et des Télécommunications (ARPT) compte mettre en place un nouveau plan national de numérotation téléphonique. Il fera l’objet demain d’une conférence de presse animée, au siège de l’Autorité, par Mohamed Belfodil, président du conseil de l’ARPT.

La même source avait annoncé il y a presque une année que ce nouveau plan « sera élaboré en collaboration avec les trois opérateurs mobiles, en l’occurrence Djezzy, Mobilis et Nedjma ». L’ARPT a justifié cette mesure par « le développement fulgurant de la densité mobile nationale qui a rendu nécessaire l’élaboration d’un nouveau plan de numérotation ». Boudjemaâ Haïchour, ministre de la Poste et des Technologies de l’information et de la communication, à l’occasion de la réunion des cadres du ministère et des opérateurs du secteur, avait affirmé que dans la téléphonie mobile et grâce aux trois opérateurs activant dans ce créneau, on est passé d’une télédensité de 0,26% en 2000, soit 54 000 abonnés GSM à près de 75% à septembre 2007, soit près de 25 millions d’abonnés. Le mobile a ainsi franchi un cap très appréciable, favorisé considérablement le désenclavement des populations du monde rural, contribué au changement culturel en faveur de la généralisation de l’usage des TIC et a eu un impact positif sur d’autres secteurs économiques, notamment celui des services. La rareté des numéros disponibles a contraint l’ARPT à les attribuer avec parcimonie aux opérateurs qui en font la demande. Les préfixes 05, 06 et 07 (comportant chacun un bloc de dix millions de numéros) ont été respectivement attribués à Wataniya Télécom Algérie (Nedjma), Algérie Télécom Mobile (Mobilis) et Orascom Télécom Algérie (Djezzy) dès l’origine, à l’octroi de leurs licences respectives, en vertu des cahiers des charges accompagnant ces dernières, selon le plan de numérotation en vigueur. La mise en œuvre d’un nouveau plan de numérotation téléphonique vise à répondre aux besoins des opérateurs des télécommunications, d’une part, et de permettre l’introduction de nouveaux services à valeur ajoutée, d’autre part. Dans un communiqué du 18 octobre 2006, relatif à l’attribution des numéros aux opérateurs de téléphonie mobile, l’ARPT avait prédit « l’avènement prochain de la portabilité du numéro, faisant de l’abonné le bénéficiaire véritable du numéro et qui est la tendance dominante dans le monde. Elle fera inéluctablement partie du paysage algérien des télécommunications ». La portabilité du numéro mobile offre la possibilité à tout client d’un opérateur télécoms de changer d’opérateur tout en conservant le même numéro.

Kamel Benelkadi

Ils font partie des VIP du hadj 2007 : Des généraux en pèlerinage

décembre 16th, 2007

Le hadj version 2007, ici à La Mecque, a attiré comme chaque année de nouvelles têtes très connues et même galonnées du paysage institutionnel algérien.

La Mecque (Arabie Saoudite). De notre envoyé spécial

Des hauts gradés de l’armée, des personnalités nationales du mouvement sportif et associatif ont enfilé « libass al ihram » (l’habit du hadj) pour accomplir le pèlerinage aux Lieux Saints de l’Islam. Mais la présence de quelques généraux à la retraite et en fonction aura volé la vedette parmi l’aréopage des personnalités venues accomplir le hadj. On a pu ainsi distinguer notamment le général à la retraite Mohamed Bouachareb, Mohamed Anbar qu’on dit ici au fait des grands dossiers du ministère des Affaires religieuses ainsi qu’un lieutenant-colonel qui s’est installé dans un hôtel à Makkah. Aussi, des sources crédibles confirment la présence de l’adjoint du directeur général de la sûreté nationale (DGSN) Ali Tounsi, en plus des cadres de quatre ministères. La majorité de ces invités de marque est hébergée dans l’enceinte abritant le siège de la mission algérienne située à une portée de fusil du Harram. Au titre des habitués de la Mecque, on note la présence pour la deuxième fois de suite du secrétaire général de l’Union des paysans algériens (UNPA), Mohamed Alioui, et de quelques ex-ministres (Bachir Rouis), des walis, des procureurs et certains cadres des différentes administrations. Le responsable de la Fédération nationale des associations de sauvegarde de la jeunesse (FASJ), Abdelkrim Abidat, est également en pèlerinage en compagnie d’une quinzaine de vieux et vieilles personnes que le président de la République lui aurait confiés, dit-on ici. Tewfik, un hadj invisible Cela étant dit, la grosse rumeur ici court sur le patron du Département du renseignement et de la sécurité (DRS), Mohamed Mediène, dit Tewfik, qui serait arrivé vendredi soir au siège de la « biâtha ». Bien que nous ne l’ayons pas aperçu, des indiscrétions certifient qu’il est bel et bien présent pour accomplir le pèlerinage. Une source confie qu’il s’était même rendu à l’infirmerie en compagnie de son garde du corps qui devait recevoir des soins pour une petite égratignure au front. Une autre source assure qu’elle a aperçu le patron du DRS à sa descente du véhicule, précisant que des agents ont accouru pour monter les bagages sur fond « d’alerte au siège de la mission ». La moudjahida « Mme Saïda », secrétaire nationale de l’UNFA, confirme elle aussi la présence de Tewfik. « Je le connais bien, je l’ai vu et tu peux demander à l’infirmière qui a soigné son garde du corps », soutient-elle, formelle. Quoi qu’il en soit, il s’avère que l’édition 2007 du hadj a été rehaussée par les hauts gradés de l’armée contrairement à la précédente qui avait vu défiler une douzaine de ministres du cabinet Belkhadem. Ceci même si l’on annonce l’arrivée « imminente » de Noureddine Moussa et El Hadi Khaldi, respectivement ministres de l’Habitat et de la Formation et de l’Enseignement professionnels. Concernant le premier cité, son SG est déjà arrivé à La Mecque. On notera enfin l’arrivée de l’ex-champion du monde du demi-fond, Nourredine Morceli, qui a émis le vœu de rencontrer les journalistes pour une conférence de presse… à La Mecque.

Hassan Moali

Troisième mandat pour Abdelaziz Bouteflika : Le consensus tarde à se dessiner

décembre 16th, 2007

Une question revient avec insistance depuis quelque temps : Bouteflika partira-t-il à la conquête d’un troisième mandat ? Ira-t-il jusqu’au bout de son vœu exprimé il y a plus d’une année de réaménager la loi fondamentale pour se succéder à lui-même ? Certains observateurs n’en doutent pas : le président Bouteflika a fait part, dès le début de son règne, de son insatisfaction de l’actuelle Constitution et de sa franche volonté de lui apporter des modifications.

Une volonté qu’il a réaffirmé publiquement le 4 juillet 2006 devant l’état-major de l’Armée. Depuis son congrès réunifacteur en février 2005, le FLN, dont le président n’est autre que le chef de l’Etat, mène une campagne tambour battant pour l’amendement de la Constitution, notamment l’article 74 limitant la durée du mandat présidentiel à cinq ans, lequel mandat est renouvelable une seule fois. Si pendant des mois ils se cachaient derrière une certaine imprécision de la nature du système politique et un manque de clarté dans la répartition des pouvoirs entre le président de la République et le chef du gouvernement, les promoteurs zélés de cette révision finissent par révéler leur véritable dessein au grand jour : un troisième mandat. C’est le secrétaire général du FLN et également chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, qui l’a vivement revendiqué durant la campagne électorale pour les élections du 29 novembre dernier et au dernier jour de la visite d’Etat du président français Nicolas Sarkozy en Algérie effectuée du 3 au 5 du mois en cours. D’autres organisations et associations satellites se sont vite jointes à l’appel du FLN pour réclamer en chœur un autre mandat pour l’homme qui a, selon eux, « sauvé l’Algérie ». Depuis, les déclarations d’associations de « soutien pour un troisième mandat » n’arrêtent pas de « pleuvoir » sur les rédactions. Mais ces soutiens déclarés lui sont-ils suffisants pour passer à l’action ? Rien ne semble sûr ! La dernière sortie médiatique d’Ahmed Ouyahia, secrétaire général du RND (membre de l’Alliance présidentielle composée également du FLN et du MSP), si elle recèle une certaine ambiguïté, révèle que la question est loin d’être tranchée au sommet. Interrogé sur la position de son parti par rapport à la question du troisième mandat pour le président Bouteflika, M. Ouyahia dit : « Nous sommes en décembre 2007 et l’élection présidentielle se déroulera le premier semestre 2009. Le chemin est encore long et il y a 99 problèmes plus graves à régler. » Rappelant que la révision constitutionnelle relève des seules prérogatives du chef de l’Etat, M.Ouyahia a souligné que son parti a déjà refusé de se prononcer sur « la présidentielle » sous le motif qu’une telle décision ne pourrait être prise sans se référer à la Constitution et aux instances du parti. Mais en même temps, M. Ouyahia réitère « la satisfaction de son parti devant l’annonce faite par le président de la République le 4 juillet 2006 de présenter un projet de révision constitutionnelle ». Le patron du RND ne veut pas, selon toute vraisemblance, se prononcer, comme il l’a si bien dit, « prématurément ». Il préfère encore attendre pour mieux voir. Le MSP de son côté entretient aussi une position ambiguë sur la question. Il estime que la règle de l’alternance doit être respectée tout en réaffirmant son soutien à toute démarche venant du Président. Cela supposerait qu’il n’y a pas eu encore consensus au sein du sérail et que le troisième mandat n’est pas encore acquis pour Bouteflika. En faisant preuve de « vigilance », M.Ouyahia ne semble pas vouloir courir le risque de compromettre son « avenir politique » et ses chances de partir, un jour, à la conquête du Palais d’El Mouradia. La partie n’est-elle donc qu’à son début ?

M. A. O.

76e anniversaire de la naissance de Baya, artiste peintre : Projet d’un site Internet et d’une fondation

décembre 12th, 2007

Surnommée aussi « La douce Baya », un qualificatif artistique donné par Edmonde Charles Roux, une journaliste spécialisée dans l’art. Baya est née à Bordj El Kiffan, ex-Fort de l’eau à 20 km à l’est d’Alger en 1931.

Orpheline à l’âge de 5 ans, elle fut élevée par sa grand-mère qui travaillait comme domestique dans une ferme appartenant à une famille de colons. Son « génie » et sa vocation pour la peinture et le dessin ont été découverts par la sœur de la propriétaire de la ferme, une certaine Marguerite qui était également l’épouse d’un amateur d’art. On lui donna alors des crayons de couleur, du papier et de la glaise, histoire de l’occuper et surtout pour développer sa vocation artistique. A l’âge de 13 ans, Baya produisait déjà ses premières œuvres. « J’ai commencé très jeune. A cinq ans environ, j’avais trouvé une revue pour enfants et je m’étais mise à copier les dessins. Alors, on m’avait dit : ‘’ce n’est pas bien, c’est défendu, ça ne sert à rien de copier. Si tu veux peindre, peins ce qui te passe par la tête mais il ne faut jamais recopier’’ », raconta l’artiste blidéenne à un journaliste d’Algérie-Actualités en 1982. A l’âge de 15 ans, une œuvre de Baya avait rendu « fou » Aimé Maeght, un célèbre marchand d’art à l’époque, qui trouva matière à exposer dans sa galerie. « C’est cela que je veux exposer » dira-t-il à Baya. C’était l’occasion pour elle d’exposer douze grandes gouaches à Paris, au niveau de la galerie Maeght. Ce fut un large succès pour Baya vêtue de son seroual à rayures dorées et des babouches brodées, des vêtements qui sont conservés par ses enfants. En 1948, Baya qui fut également une excellente potière et sculptrice avait rencontré lors d’une exposition à Vallauris (France), le grand artiste Picasso. A propos de cette rencontre, elle avait déclaré toujours à Algérie-Actualités que : « Picasso faisait à l’époque ses fameuses assiettes. Nos ateliers étaient voisins et il venait de temps en temps me rendre visite. Nous discutions. Parfois, nous mangions le couscous ensemble. Des gens ont dit qu’il m’avait montré comment travailler. Pas du tout. Chacun travaillait en fait, de son côté. C’était pour moi, d’une certaine manière, un choc. Connaître tout ce monde, voir tant de choses. Je n’étais pas habituée. ». Edmonde Charles Roux, rédactrice à la revue Vogue spécialisée dans l’art et envoyée spéciale à Vallauris pour couvrir cet événement, avait écrit : « Baya faisait corps avec son œuvre…Elle m’apparaissait comme un personnage mythique, mi-fille, mi-oiseau, échappé de l’une de ses gouaches ou l’un de ses contes dont elle avait le secret et qui lui venait on ne savait d’où… » Jean de Maisonseul, ancien conservateur du Musée d’Alger, a écrit pour sa part : « C’est le mystérieux secret de Baya, qui surgit des sources les plus lointaines du mythe et du rêve, dont certains savent retrouver la clef. » Le père du surréalisme, André Breton, émerveillé par le travail intuitif de Baya, lui consacra un long et élogieux texte dans la revue Derrière le miroir : « Baya, qui tient et ranime le rameau d’or ». La « douce Baya » avait connu toutefois une période de répit pendant les années 1950, suite à son mariage dans la tradition avec El Hadj Mahfoudh Mahieddine, un chanteur de musique andalouse connu à Blida, elle se consacra à ses 6 enfants et à sa vie familiale. Après l’indépendance, l’artiste blidéenne avait produit davantage de merveilles, ce fut l’âge d’or de sa carrière. En 1978, elle avait apporté son soutien à la cause palestinienne en exposant à côté de plusieurs artistes arabes. Durant cette époque, l’influence de son époux sur ses œuvres était aussi remarquable, puisque les instruments qu’il utilisait à l’instar du luth, de la mandore ainsi que de la guitare, étaient souvent présents dans ses tableaux, une façon spontanée et surtout naïve de montrer sa fidélité envers lui. Ces instruments disparaîtront des œuvres de Baya à partir de 1979, une année fatidique pour elle, puisqu’elle perdait son bien-aimé. Cela l’avait rendue triste et mélancolique, comme l’était Baya enfant orpheline. Heureusement, elle avait trouvé dans la pratique de son art un moyen d’évasion et de refuge. Douée d’une grande volonté, Fatma Haddad a toujours rendu service à la culture algérienne. En 1982, le président français François Mitterrand lui rendit hommage après l’inauguration d’une exposition individuelle au musée Cantini à Marseille. Le quotidien français Le Monde avait écrit lors de cet événement dans son édition datée du 10 novembre 1982, « l’Algérie reste malgré tout la nation extérieure la plus présente aux expositions de Marseille, notamment grâce à l’étincelante rétrospective de Baya, cette femme peintre autodidacte, échappant à toutes les classifications établies, est l’un des sommets des manifestations marseillaises ». Elle n’avait pas cessé de faire le tour du monde en exposant également à La Havane (Cuba) en 1986, à Bruxelles en 1989, au Koweït en 1990, à Washington en 1994, au Sharjah (Emirats arabes unies) en 1995, à Tunis en 1996, à Thessaloniki (Grèce) en 1997 et enfin à Ankara (Turquie) en 1998. Son passage en Turquie était pour elle son dernier périple, puisqu’elle décède le 9 novembre de cette année, à l’âge précoce de 67 ans alors qu’elle pouvait donner davantage. En 2001, une salle d’exposition dédiée à sa mémoire a été baptisée au niveau du Palais de la culture d’Alger. En 2003, plus de 70 œuvres de Baya ont été présentées au musée d’Arles dans une rétrospective de sa carrière. La galerie d’art de Sonatrach avait rendu un hommage à cette peintre, du 6 au 11 mars 2006 à l’occasion de la Journée de la femme, en exposant ses tableaux les plus connus comme Femmes avec deux vases et Femme en orange, datant de 1947, Femme avec sa fille sous le palmier de 1948, La grande harpe de 1984, Instruments avec oiseaux de 1989, et Bougeoir et instrument de 1997. Ses œuvres sont aussi présentes lors de la manifestation Alger, capitale de la culture arabe. 50 tableaux ainsi que des sculptures, jamais exposées auparavant, ont fait connaître davantage Baya, surtout pour les hôtes arabes. Quelques jours après, c’était le tour de la localité touristique de Saint Hilaire de Riez (ouest de la France) d’abriter une exposition de 25 tableaux de la défunte Baya, au niveau même du siège de la municipalité de cette ville. Son fils Othmane nous dira que les nombreux touristes, qui avaient assisté à l’exposition, ont été émerveillés par les œuvres de sa mère. Aujourd’hui, ses tableaux sont présents au niveau de la présidence et autres institutions nationales ainsi qu’au niveau de nos ambassades et consulats à l’étranger, ce qui fait de Baya un mythe qui représente par excellence la culture algérienne. D’ailleurs, l’ex-président de la République, Chadli Ben Djeddid et Abdelaziz Bouteflika sont de véritables admirateurs de ses œuvres. Malheureusement, la ville chère à Baya, Blida, ne possède aucun musée sur son territoire et Baya, avec une carrière d’un demi-siècle, risque d’être oubliée un jour, puisque rien ne perpétue son existence dans la ville des Roses. Ses enfants, notamment Othmane, comptent créer un site Internet regroupant la biographie, les œuvres, les témoignages et interviews ainsi que les articles de presse sur l’artiste blidéenne. Ils envisagent de créer aussi une fondation portant le nom de leur mère, afin de sauvegarder toute une mémoire et de perpétuer les œuvres de celle qui avait ouvert la voie à la peinture algérienne contemporaine à côté de Khadda, Rassem et Issiakhem entre autres.

Mohamed Ben Ahmed

Deux attentats kamikazes font 72 morts et deux cents blessés

décembre 12th, 2007

L’horreur un 11 décembre sur l’avenue du 11 Décembre

9 h 30 La circulation est très fluide sur l’avenue du 11 Décembre 1960, à El Biar, sur les hauteurs d’Alger, en ce 11 décembre 2007. Des officiels et étrangers arrivent à l’hôtel des magistrats où devait s’ouvrir sous l’égide de l’Unicef un séminaire international sur les violences à l’égard des enfants.

Deux bus de transport d’étudiants et de nombreux véhicules légers se suivent. Un camion bourré d’explosifs sort de sa position, dépasse l’un des deux bus, à bord duquel se trouvaient le chauffeur et deux agents, et fonce brusquement sur le parking du nouveau siège du Conseil constitutionnel, inauguré il y a à peine quelques mois. Du véhicule de police, stationné en permanence sur le trottoir mitoyen, sort un brigadier qui tente de stopper le poids lourd, conduit selon des témoignages par un jeune homme. Il est 9h45. Subitement, une puissante déflagration souffle l’ensemble des bâtiments qui longent l’avenue. Une épaisse fumée noire s’élève dans le ciel. Quelques secondes plus tard, des cris de douleur brisent le silence macabre qui s’est abattu. Des hommes et des femmes ensanglantés courent dans tous les sens. Des véhicules sont projetés sur des dizaines de mètres. A l’intérieur, les conducteurs sont déchiquetés et certains calcinés. Le bus de transport des étudiants s’est transformé en un amas de ferraille au milieu duquel se trouvent trois corps réduits en bouillie. Des lambeaux de chair et du sang recouvrent la chaussée. Une moto coupée en deux, la partie supérieure du corps de son conducteur volatilisée. Les façades en verre de l’hôtel des magistrats s’effondrent. Les premiers blessés sont évacués par les passants, d’autres reçoivent les premiers soins à la polyclinique mitoyenne, assiégée par les passants sous le choc. Les ambulances de la Protection civile, les services de sécurité et la police scientifique arrivent sur les lieux. Il est 10h. Un cratère de trois mètres de diamètre est visible à l’entrée du parking du Conseil constitutionnel. Du véhicule piégé, il ne reste que le train coincé au milieu des débris. Des dizaines de véhicules, soufflés par l’explosion, sont encore sous les décombres. Les agents de la Protection civile déterrent les corps totalement déchiquetés des deux gardes républicains, en faction devant l’institution, et de trois civils dont une femme exerçant à l’administration. Les corps sont entreposés à l’hôtel des magistrats. « Ramenez les civières, il y a un autre corps à retirer », crie un agent de la Protection civile, le visage recouvert de poussière, le treillis taché de sang. Il a déjà extrait des décombres au moins une dizaine de corps, dont ceux de trois policiers et des deux gardes républicains. Ses collègues s’affairent à retirer les corps coincés dans les véhicules. Le ministre de l’Intérieur, Yazid Zerhouni, et le ministre de la Solidarité, Djamel Ould Abbas, arrivent sur les lieux. Ils s’informent des circonstances de cette tragédie. Interpellé, Zerhouni nous déclare : « Le bilan que nous avons est encore provisoire. Je crois qu’il y a eu neuf morts et une trentaine de blessés. » Et de préciser : « Il y a eu deux explosions. Une à El Biar et une autre à Hydra, dont nous ne connaissons pas l’origine. » Le ministre a une mine triste et semble abattu. Il quitte les lieux une dizaine de minutes plus tard, pour rejoindre Hydra, où un autre camion piégé a foncé sur le siège de la représentation de l’ONU. Quelques minutes après, c’est le frère du président de la République qui arrive sur les lieux. Une heure plus tard, c’est le chef du gouvernement qui fait irruption et discute avec les officiers des services de sécurité. Une foule compacte tente de forcer le cordon sécuritaire. Sans aucune information de leurs proches, des familles des victimes envahissent les lieux. Elles sont vite bloquées dans leur élan par des policiers antiémeutes, intransigeants.

Chawki Amari et Mustapha Benfodil. Journalistes et auteurs : L’ivre passion d’un duo pour les mots décroisés

décembre 8th, 2007

Vous venez de signer tous les deux des ouvrages initiatiques. Une quête de votre pierre de touche, votre Graal…

Mustapha Benfodil : Je ne sais pas si on peut considérer Archéologie du chaos (amoureux) comme un roman d’initiation. Le roman s’ouvre sur l’adolescence du narrateur qui fait la plus grande découverte de ses 17 ans : le mystère du corps féminin par le biais de sa « très belle-mère », la sulfureuse Kheïra qui lui donnera ses premières leçons de (mauvaise) éducation sentimentale. Suivra un autre mentor, pour une quête autrement plus excitante : le « Professeur Impossible » qui va le jeter dans les bras de l’Univers après l’avoir initié à la passion algébrique du monde.

Chawki Amari : Dans mon dernier livre, je relate la quête de quelqu’un, qui est un peu la mienne. Pourquoi n’y a-t-il rien d’autre que du pétrole quand on creuse le sous-sol algérien ? Pas de traces archéologiques, pas de témoignages d’une vie passée, rien. Les Algériens n’existent-ils que depuis Sonatrach ?

Au commencement, pour l’un, c’est le big bang et pour l’autre, le trou noir qui n’est pas stellaire mais dunaire…

M. B. : La vue de la « Chose », la « Sublime Plaie », par le narrateur, provoque chez lui un « tremblement de chair ». A son échelle du Cosmos, cela va être effectivement son big bang personnel qui déclenchera la réaction en chaîne de son dérèglement des sens, le plongeant dans un état où chaos et Eros n’auront de cesse de s’engendrer l’un de l’autre.

C. A. : Les astrophysiciens qui ont inventé le big bang sont les mêmes qui ont inventé les trous noirs. Ce sont des théories qui sont censées rendre compte de la création de l’univers. Le premier est la lampe qui a inventé la lumière, les seconds sont des mangeurs de lumière. Mais qui a inventé la mayonnaise ?

Le thème (t’aime) vous fédérant : l’amour (acception physiologique, psychique, onirique, vache…) chaotique, cahoteux… Un anathème ?

M. B. : Un foutoir à thème… L’amour et la mort. Cadavres érotiques. Sexes palimpsestes. « Cocu-fictions » et inceste. Plan biscornu d’une révolution rose où il est question d’un « commando d’insémination des filles du système ». C’est le bordel général. Partouze de sens et de non-sens. Le chaos affectif est total. Tout le roman est parcouru de « courts-circuits » amoureux qui électrisent sans cesse les personnages et attisent leurs frustrations. Du coup, leur énergie (sexuelle) refoulée se transforme en cocktail Molotov fabriqué avec le concentré de leur libido avariée.

C. A. : L’amour et son contraire intime, la haine, expliquent en Méditerranée, à peu près tout. En Algérie, il explique la guerre, la politique, la revanche, la terre et les conflits de pouvoir, le sang et la sensualité. Il explique tout, sauf la mayonnaise.

Dans vos livres, vous exploitez l’espace immédiat, urbain et saharien…

M. B. : Il y a effectivement un côté « roman urbain » fait de références à la vie dans les caves glauques d’Alger, la vie dans les campus, la vie nocturne, les incursions du narrateur dans les milieux interlopes algérois, sa vie de bohème, les virées dans l’Alger des bas quartiers, l’Alger des couvre-feux, l’Alger des marginaux, l’underground algérois en somme. Mais au-delà de cet ancrage topographique, je revendique pleinement un côté « culture urbaine » fait de langage « jeune », populo, décalé, porté par un « Comité d’insolence » agglutiné autour de Emile Yacine. Il explore les codes des jeunes, ceux des ghettos aussi bien que la « tchitchi ». Le texte est truffé de références au slam, au rap, au chaâbi, et la partie graphique du roman est un clin d’œil évident, je dirais même un hommage aux graffiti, aux tags, aux blagues, aux gros mots, au vomis sur les murs. Tout cela se résume dans ce que j’appellerais « la pop littérature ». Le roman se nourrit donc de toute cette « subculture » des quartiers, cette culture « houmiste » incarnée par le « Manifeste du Chkoupisme » qui pose les jalons d’un interventionnisme artistique subversif mené par un groupe d’agitateurs urbains baptisé « Les Anartistes ».

C. A. : L’Algérie est un grand pays, au sens géographique. Elle est pourtant petite, au sens de la vision générale. Entre les deux approches, il y a des espaces absurdes et pleins de bon sens qu’il faut fouiller, comme dans un champ de sachets noirs où l’on peut trouver des piles qui marchent encore.

Vous avez en commun l’usage du name-dropping (noms et référents, Rimitti, Bukowski, Nabokov) qu’utilisent les rappeurs…

M. B. : Dans tous mes romans, mes choix « onomastiques » se sont toujours faits dans le sens d’une identification par le surnom, le sobriquet, le référent littéraire ou mythologique. Parfois, certains de ces noms propres sont paresseusement et bêtement fonctionnels. Sinon, l’état civil de mes personnages joue sur le grotesque, la caricature (Abou Kalypse). Il y a un côté « BD » qui m’amuse beaucoup dans l’octroi des noms. Parfois, c’est angoissant. Dans l’histoire de la littérature universelle, il y a des noms entiers qui sont devenus des archétypes, des codes, des raccourcis esthético-idéologiques. Je pense par exemple à Monsieur Plume d’Henri Michaux, Mohamed SNP de Boudjedra, Lolita de Nabokov ou encore Fouroulou de Mouloud Feraoun. Je joue beaucoup sur les mélanges et me joue des identités, comme « Alfred Djelloul Bensimson », le père arabo-franco-juif de Ouali Ben Oualou dans Les Bavardages du Seul .

C. A. : Les noms sont faits pour ne pas être oubliés. Sinon, on aurait tous des numéros. On connaît le numéro 1 en Algérie, mais qui est le dernier ?

Des clins d’œil…

M. B. : Oui, ça fonctionne aussi comme des clins d’œil, comme « Léo Fêlé » dans Archéologie… Cela souligne également l’ancrage du roman en termes d’intertextualité.

C. A. : A tous les déserts du monde, où vivent tous ces gens qui se sentent si seuls dans l’univers. Ou à tous les ophtalmologues qui rendent la vie plus claire, ça marche aussi.

Quel est votre impératif ?

M. B. : Eviter le « Prix poubelle ».

C. A. : Lis, au nom de Dieu. Ou un autre. Mais lis quand même.

Votre subjonctif…

M. B. : Composer le « Kama Soustara » pour paraphraser mon ami le comédien Samir El Hakim, dussé-je essuyer les foudres de ma chère femme. C. A. : Quelle heure faille-t-il être se lever pour ne pas puisse avoir été en retard à la réunion ?

Vous êtes journalistes et auteurs. Vous êtes cursifs ou scripts ?

M. B. : Par moments, le littérateur et le journaliste qui cohabitent sous mon nom prennent un pot sans s’entretuer. Cursif ou script ? Disons que je suis passé par tous les stades darwiniens de l’écriture : cahiers d’écolier, machine à écrire type PV de gendarmerie, machine électrique vers l’âge proto-informatique, puis vint tout naturellement l’âge de la souris et de la puce intelligente. Qui sait ? La prochaine étape, ce sera peut-être le e-book ou le « bip-book ». La littérature anorexique nous renverra bizarrement vers le morse et la sténo. Qui a dit que l’Histoire ne se mangeait pas la queue ?

C. A. : Vous pouvez répéter la question ?

Vous êtes Yin ou Yang ?

M. B. : Une minute : je vérifie ma polarité..

C. A. : Ni République intégriste ni Etat policier. Encore moins une Algérie sous domination chinoise. En plus, la question est mal posée puisqu’en Algérie, comme dans toute l’Afrique, on n’est pas binaire mais on fonctionne en ternaire, suivant des cycles de trois. Le 6/8 en musique, les trois jours d’hospitalité, du vent de sable ou du nombre de mandats présidentiels.

Avez-vous des tics ou tocs en écriture extra-journalistique ?

M. B. :J’arpente l’appartement dans tous les sens tel un fauve en cage. Je peux faire dix kilomètres ainsi à tourner en rond sous l’abribus de l’inspiration qui ne se pointe pas, appuyant sur « delete » sitôt ayant cru avoir attrapé le truc.

C. A. : Quand j’écris, je pense souvent à mon compte en banque. Je tremble quand je pense que je gagne encore 15 000 DA par livre.

Au vu de vos atomes crochus, vous pourriez écrire un livre à quatre mains. Quel en serait le titre ?

M. B. : Excuzator.

C. A. : Les 20 doigts qui n’ont pas ébranlé l’Algérie.

Le faiseur de trous de Chawki Amari Roman/138 pages/Editions Barzakh/2007 Archéologie du chaos (amoureux) de Mustapha Benfodil Roman/250 pages/Editions Barzakh/2007

K. Smaïl

Unesco-Colloque sur Frantz Fanon : L’homme multiple

novembre 29th, 2007

Comment penser le monde actuel à partir de l’auteur des Damnés de la Terre ? Le siège de l’Unesco, à Paris, accueillera, dès demain, un colloque de deux jours consacré à Frantz Fanon.

Organisée dans le cadre de la célébration de la Journée mondiale de la philosophie, cette rencontre intitulée « Penser aujourd’hui à partir de Frantz Fanon » est organisée par le Centre de sociologie des pratiques et des représentations politiques de l’université : Paris Diderot avec le soutien des fondations La Ferthé et Frantz Fanon. Plusieurs « angles » du personnage seront abordés en quatre sessions. La première « agir et penser les révolutions », accueillera plusieurs intervenants, dont les deux historiens Mohamed Harbi et Benjamin Stora qui aborderont respectivement « Question paysanne et mouvements paysans en Algérie » et « Fanon et une lecture de la guerre d’indépendance algérienne » Dans la deuxième session, « Psychiatrie et politique », il sera question de Fanon le psychiatre. Dans les années 1950, il parlait de désaliéner l’institution psychiatrique qui doit être un lieu où soignants et patients peuvent cohabiter et où les seconds doivent se voir restituer leur dignité. A la même époque, il tentait d’intégrer la réflexion sur la folie à une interrogation sur l’aliénation sociale et culturelle, l’histoire singulière d’un individu étant liée au contexte historique dans lequel il évolue. Bref, psychisme individuel et contexte global est un concept essentiel dans son premier ouvrage, Peau noire, masques blancs (1952). Fanon y parle de « désaliéner » l’homme noir, ce qui implique une « prise de conscience abrupte des réalités économiques et sociales ». Lorsqu’il est nommé médecin chef à l’hôpital de Blida-Joinville, en 1953, il prendra très vite conscience de la spécificité des patients algériens. Et agit vite en impulsant la création de lieux et d’évènements spécifiques (café maure, célébration des fêtes religieuses…). La troisième séance qui lui est consacrée se propose de faire un zoom sur les « Figures du racisme ». On y retrouvera entre autres allocutions : Fanon et l’identité noire au Brésil, par Antonio Sérgio Alfredo Guimarães (Université de São Paulo) et Actualité d’une pensée indigène, par Fatma Oussedik (Université d’Alger). En dernier lieu, « Dialectiser les identités ». Dans cette session, Lewis Gordon (Temple University, Philadelphie), évoquera Fanon dans la pensée politique africaine récente, alors que Malek Bouyahia (Université Paris 8) présentera une communication intitulée « Braconniers » en territoires intimes : Fanon et Sénac ou les appartenances critiques. Dans cette dernière partie, Eileen Julien (Indiana University Bloomington) évoquera également Fanon le poète. Psychiatre, penseur, écrivain, journaliste, militant, poète, cet homme multiple avait choisi l’Algérie comme creuset de son universalité.

Z. M.

Photographie-Les tirailleurs africains : Voir, c’est écouter

novembre 29th, 2007

Après les réfugiés palestiniens et sahraouis et les sans-terre d’Amérique latine, de Williencourt est allé sur les traces de ces soldats malgré eux.

Le photographe français Hervé de Williencourt est un personnage attachant. Pour son art, mais aussi pour nourrir sa famille, il a quitté Paris pour s’installer dans la campagne bretonne où il cultive la terre. L’argent qu’il gagne grâce aux tomates et aux pommes bios, il le dépense pour sa passion. Celle-ci le conduit toujours sur les traces des drames humains qu’il va poursuivre autant dans le présent que dans le passé. Son travail intitulé « Les tirailleurs africains, un devoir de mémoire » permet de souligner, à l’échelle humaine, un pan sensible de l’histoire franco-africaine. En France, on entend souvent dire : « Sans les Américains, on parlerait allemand aujourd’hui. » Rarement un mot sur les Africains qui, pourtant, furent aux premières lignes du front allié et périrent en grand nombre. Lors des grandes célébrations, on ne se souvient que peu de la participation de l’armée d’Afrique : plus de 100 000 Maghrébins (sans compter donc les tirailleurs d’Afrique noire), seulement entre 1942 et 1944. A l’époque G. Monnerville, président de la commission de la France d’outre-mer à l’Assemblée consultative provisoire, proclamait : « Sans l’empire, la France ne serait qu’un pays libéré. Grâce à son empire, la France est un pays vainqueur. » D’après l’historien Belkacem Recham, de Gaulle a construit le mythe de la libération autour de la résistance franco-française, au détriment des autres unités d’Afrique. Par ailleurs, la décolonisation a vite achevé le mythe du dévouement des populations des colonies envers la mère patrie. Mais une autre cause a nourri cette amnésie : le racisme. Frantz Fanon, parti volontairement combattre le nazisme, n’a-t-il pas écrit à ses parents : « Je me suis trompé. » Et d’expliquer plus loin : « La hiérarchie militaire française est construite sur la couleur de la peau. » Dès 1830, le corps des zouaves a été créé en Algérie. Les tirailleurs suivirent en 1841. Composés d’autochtones, leur encadrement revenant exclusivement à des Européens, ces soldats ont été utilisés pour d’autres conquêtes coloniales et d’autres guerres : Madagascar, Algérie, Italie, Crimée, etc. Pendant la guerre franco-allemande de 1870, les Français renforcèrent leurs régiments avec le corps des tirailleurs et des spahis (cavalerie indigène). C’est pour une bonne part le succès des soldats africains pendant cette guerre qui a conduit la France à recourir à leurs services pour les deux guerres suivantes. Ainsi, 400 000 d’entre eux (parmi eux mon grand-père) participèrent à la guerre de 1914 - 1918 (Première Guerre mondiale). Des dizaines de milliers ne sont plus revenus chez eux. Ils furent utilisés dans les batailles les plus meurtrières : la Marne, la Somme, l’Aine et, évidemment, Verdun. Le plus abject dans cette histoire, c’est que les tirailleurs africains n’ont pas seulement été utilisés pour des causes justes, comme le combat contre le fascisme, mais aussi pour réprimer dans le sang des insurrections anticoloniales d’un pays à l’autre. « Quand j’ai entendu parler des tirailleurs africains, nous dit Hervé de Williencourt, je suis parti immédiatement après à leur recherche. D’abord au Sénégal, parce qu’on dit toujours tirailleurs sénégalais. Après, je suis parti au Bénin, au Tchad, en Côte d’Ivoire, au Burkina Faso, au Maroc, etc. Je ne pouvais plus m’arrêter. C’est devenu comme une obsession. Je voulais les rencontrer tous, un par un. » En cela, le travail de ce photographe est exceptionnel. Il ne réduit pas ces soldats malgré eux au simple statut de sujet artistique. Il les perçoit d’abord comme individus. Dans ces clichés, les tirailleurs se tiennent droit comme pour montrer qu’ils sont toujours aptes malgré leur âge avancé. Souvent, ils ont remis pour la pose leurs trophées et médailles glanés sur les champs de bataille, comme pour prouver l’importance de leur rôle dans l’histoire. Cette démarche respectueuse et proche de ses sujets, Hervé de Williencourt la poursuit depuis longtemps déjà : avec les premiers réfugiés palestiniens de 1948 comme avec les réfugiés sahraouis et les sans-terre d’Amérique latine. Il se penche aujourd’hui sur les faucheurs de maïs en France. Avant de prendre ses photos, Hervé enregistre les histoires individuelles : « Ils me parlent. En fait, ils me parlent parce que je les écoute, tout bêtement. Un jour, dans un village, au Mali, un vieux tirailleur me dit : ‘‘Une parole est une parole parce qu’elle est écoutée. Tu es venu pour connaître notre vie pendant la guerre. Tu es venu et tu vas repartir avec nos paroles. Alors peut-être que maintenant les Français vont se souvenir’’ ». Ce travail admirable qui a été montré en marge de la 30e édition du Festival de cinéma consacré aux minorités de Douarnenez, la jolie ville bretonne, a marqué ceux qui l’ont vu. C’est un témoignage digne et sobre d’un passé encore méconnu et parfois méprisé, en dépit du succès spectaculaire du film Indigènes. Mais tout spectacle n’est pas art.

Abdenour Zahzah

11 morts et plusieurs villes paralysées : Trop de défaillances

novembre 29th, 2007

Les pluies diluviennes qui se sont abattues depuis le début de la semaine sur le nord du pays continuent de faire des victimes et paralysent beaucoup de villes côtières.

Le bilan est d’ores est déjà trop lourd. Au moins onze personnes ont trouvé la mort et de nombreuses familles sont sans abri. Des ports et des routes sont encore bloqués et des ponts se sont effondrés, provoquant une paralysie générale. Les autorités communales, qui préparaient les élections locales d’aujourd’hui, se sont retrouvées impuissantes à prêter secours à des citoyens en difficulté. Ceci est le résultat d’un déficit flagrant, voire carrément d’une absence de moyens appropriés pour résoudre de telles situations. Et dire que nous ne sommes qu’à la fin de l’automne et que l’hiver s’annonce encore plus difficile. Ces intempéries ont, en tout cas, mis à nu la politique gouvernementale qui ne cesse de faire l’éloge de ses réalisations pour lesquelles d’énormes enveloppes budgétaires ont été consacrées. En effet, le gouvernement a alloué des budgets faramineux pour le développement des collectivités locales. Des enveloppes supplémentaires ont été également distribuées, depuis 2003, lors des tournées présidentielles dans les différentes wilayas du pays pour le même objectif. Où est passé tout cet argent ? Où a-t-il été dépensé ? Qui est responsable de l’état actuel des choses ? Il est vrai que les précipitations de ces derniers jours sont très importantes, mais cela ne justifie pas la défaillance des autorités à tous les niveaux dans la prise en charge des affaires des administrés. Les effondrements de ponts, les inondations des cités et les obstructions d’artères principales et axes autoroutiers témoignent du bricolage et du non-respect des normes requises dans la réalisation des projets et la prise en charge des affaires des citoyens. Mais, il semble qu’on ne retient pas toujours les leçons. Le déluge qui a emporté en 2001 Bab El Oued a été vite oublié. Les hautes autorités du pays recourent toujours aux mêmes promesses. Lors de sa tournée, avant-hier, dans les régions inondées de la banlieue ouest d’Alger, le chef du gouvernement, Abdelaziz Belkhadem, a promis d’apporter une aide d’urgence aux sinistrés et a annoncé qu’il allait même faire appel à l’armée pour venir en aide aux sinistrés des zones isolées. Pour sa part, le ministre délégué chargé des Collectivités locales, Daho Ould Kablia, qui s’est déplacé hier à Dellys (est de Boumerdès), a appelé « les citoyens à placer leur confiance en l’Etat et le laisser faire son devoir ». Des walis ont fait de même aussi dans leurs wilayas respectives. Est-ce suffisant, alors que la situation ne s’améliorera pas de sitôt et la population est toujours livrée à elle-même. Hier matin, trois femmes sont décédées dans la commune d’El Hamri à Oran, suite à l’effondrement d’une vieille bâtisse. Dans la wilaya de Blida, 32 familles résidant dans la commune de Ben Khelil se sont retrouvées sans domicile et ont été recasées provisoirement dans des établissements scolaires. La même situation a été enregistrée dans les wilayas de Chlef, Médéa, Djelfa et Aïn Defla. Selon un bulletin météorologique spécial (BMS), d’importantes chutes de pluies continueront d’affecter, aujourd’hui encore, les régions côtières et proches côtières de certaines wilayas du pays. Les cumuls, selon le même bulletin, atteindront ou dépasseront localement 100 mm.

Madjid Makedhi