Cinq attentats suicide en six mois : Le kamikaze, ce nouvel ennemi

Alger, le 11 avril 2007. Deux attentats suicide d’une violence extrême ébranlent la capitale et réveillent les vieux démons du terrorisme. Le Palais du gouvernement et le siège de la division est de la police judiciaire ont été littéralement soufflés par deux « bombes humaines ».

Le bilan est lourd : 30 morts et plus de 200 blessés. Le terrorisme, dans sa folie meurtrière, venait par ces opérations spectaculaires – fortement relayées par les médias du monde – de franchir une étape supplémentaire : l’attentat suicide. Un pas de plus dans l’horreur. Fraîchement rebaptisé « organisation Al Qaïda au Maghreb islamique », le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) signe son premier attentat kamikaze. Abdelmalek Droudkel, dit Abou Mossaab Abd El Wadoud, l’« émir » national du groupe, annonce dans son communiqué diffusé quelques heures après l’attentat, la « bonne nouvelle » aux Algériens : « (…) Et voilà que nous annonçons la bonne nouvelle à la nation de l’Islam (celle) du départ de trois istishadiyins pour exécuter une expédition qui est la première du genre (…) », indique le sinistre Droudkel. Plus loin, il annonce de futures opérations semblables : « Ayez la nouvelle de la venue des jeunes de l’Islam qui aiment la mort et le martyre comme vous aimez la vie de débauche (…). » Ces « cavaliers du martyre » s’appellent Boudina Merouane, alias Mouadh Ben Jabel, le kamikaze du Palais du gouvernement, 28 ans, issu du quartier populaire de La Montagne (Bourouba) dans la banlieue est d’Alger. Un « garçon sans histoire », selon ses voisins du quartier Al Kahf (La grotte). récidive Le second kamikaze, qui s’est fait exploser contre le commissariat de Bab Ezzouar, est Mouloud Hocine Benchihab. Le troisième, Zobir Abou Sajeeda, 34 ans, originaire de Tiaret, a préféré abandonner son véhicule bourré d’explosifs dans le quartier chic de Hydra, non loin du siège d’une ambassade (ou de la résidence du DGSN, selon certaines sources). Il sera arrêté en août par les services de sécurité et participera à l’attaque kamikaze contre un poste militaire à Lakhdaria, en convoyant le véhicule piégé. Passées la stupéfaction et la panique générales, les « jeunes recrues » du GSPC, dont on dit qu’elles étaient « inconnues » des services et « sans antécédents judiciaires » récidivent trois mois après le double attentat d’Alger. Lakhdaria, le 11 juillet. Les cendres encore fumantes du double attentat d’Alger, une caserne de l’armée située sur la RN5 essuie une attaque kamikaze. Un camion frigorifique, similaire à celui qui livre quotidiennement des produits alimentaires à la garnison explose à l’intérieur de la caserne après avoir franchi le poste de police. Dix militaires, dont des appelés du contingent, y laissent la vie, et ce, à quelques jours de la fin du service militaire et 35 d’entre eux ont été blessés. Au volant du camion de la mort, Mohamed Hafid, alias Soheib Abou Al Malih, âgé d’une vingtaine d’années, originaire de Bordj Menaïel, et qui avait rejoint le maquis un mois auparavant en compagnie de quatre de ses jeunes camarades. Le ministre de l’Intérieur, Noureddine Yazid Zerhouni, indiquait que désormais « il n’était pas exclu que des groupes armés se livrent à de pareilles attaques ». Le ministre donnait l’impression d’avoir « révisé » ses positions quant à la réalité de la menace kamikaze. A Alger, trois mois auparavant, M. Zerhouni affichait une autre mine. A propos du double attentat kamikaze du 11 avril, il tentera de relativiser et d’accréditer la thèse du « kamikaze qui s’est fait exploser… à distance ». A son insu même. Et sur le ralliement annoncé du GSPC à Al Qaïda, il déclare ne pas vouloir faire le distinguo entre les deux organisations criminelles. « C’est Moussa El Hadj, El Hadj Moussa (blanc bonnet, bonnet blanc) », lançait-il après l’attentat, invitant les terroristes à se rendre ou à… se suicider.
Septembre des kamikazes

Batna, le 6 septembre. Le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, venait clore son périple de « précampagne » dans les départements de l’est du pays. Son convoi a été la cible loupée d’un kamikaze qui s’est fait exploser au milieu de la foule, une vingtaine de minutes avant l’arrivée du cortège présidentiel. Le kamikaze est « identifié » quelques heures après l’attentat, a indiqué le ministre de l’Intérieur, comme étant Belazreg Houari, alias Abou Mokdad Al Wahrani, 28 ans, originaire de l’ouest du pays. L’attentat a fait 22 morts et 107 blessés. Le président de la République dont sa personne est prise pour la première fois pour cible, retourne habilement la situation en sa faveur. L’appel à la mobilisation de la société contre les attentats kamikazes (intervenu à la veille de la rentrée sociale survoltée) s’est transformé en manifestation de soutien pour le Président et sa politique de réconciliation nationale. Deux jours après, soit le 8 septembre, les kamikazes du GSPC frappent aux portes d’Alger. Un casernement des garde-côtes à Dellys (Boumerdès) est attaqué avec un camion chargé d’explosifs. Au volant du véhicule piégé, Nabil Belkacemi, collégien de 15 ans et enfant du quartier populeux de Bachdjarah. Il se donnera Abou Mossâab Zarkaoui comme nom de guerre, en hommage sans doute à l’ex-chef d’Al Qaïda en Irak, exécuteur des trois diplomates algériens à Baghdad. L’attentat suicide qui fera 30 morts et 47 blessés intervient presque une année après le ralliement du GSPC à l’organisation Al Qaïda, le 11 septembre 2006. Propulsée au-devant de la scène, la figure juvénile de l’auteur de l’attentat a stupéfait plus d’un. Issu d’une famille moyenne, Nabil Belkacemi est réputé dans sa cité des Fonctionnaires comme un « garçon sans histoire » et « apolitique », un adolescent très estimé par sa famille et ses voisins. Sa fréquentation assidue de la mosquée du quartier Apreval et de son sulfureux imam, le conduira dans les bras du GSPC. Quelques semaines avant les examens du BEM, il séchera les cours et rejoindra définitivement les maquis avec des amis à lui, dont le fils de Ali Benhadj. Le septembre des kamikazes n’est cependant pas arrivé à son terme. Le 21 survient le troisième attentat suicide du mois. Un convoi escorté transportant deux ingénieurs français et un autre italien, employés de l’entreprise française Razel, est attaqué par un kamikaze à Lakhdaria.
Les USA et l’Africom

Les trois étrangers ainsi que six membres de l’escorte, des gendarmes, ont été blessés. L’attentat intervient au lendemain de l’appel lancé par le n° 2 d’Al Qaïda, Ayman Al Zawahiri, à « débarrasser » le Maghreb des Français et des Espagnols installés dans les anciennes colonies d’Afrique du Nord. Fait troublant, l’ennemi « historique » et traditionnel d’Al Qaïda, les USA, n’est plus au cœur des prêches incendiaires des chefs d’Al Qaïda. Parallèlement, les USA poursuivent leur forcing afin de trouver un pays d’accueil pour l’Africom. Le projet de commandement américain pour le continent, consistant à installer des bases militaires en Afrique et le déploiement d’une force de 25 000 hommes rencontre depuis son annonce l’hostilité de nombreux Etats africain dont l’Algérie, l’Afrique du Sud et la Libye. Présenté par les médias français comme l’« ennemi algérien de la France », Droudkel, en sous-traitant zélé d’Al Qaïda au Maghreb, mettra sa menace à exécution. Les retombées sont immédiates. Des entreprises françaises se mettent presque aussitôt au rapatriement d’une partie de leur personnel comme ADP (aéroports de Paris), prétextant des menaces d’enlèvement et créant un mouvement de panique chez les autres investisseurs étrangers. A la suite de ce dernier attentat, le parquet de Paris ouvre une « enquête » dans ce qui fut autrefois un département français, l’Algérie. Les investigations furent confiées aux services de renseignements français, la DST. Une semaine avant l’attentat, soit le 17 septembre, le Département d’Etat américain alertera ses ressortissants résidant en Algérie ou désirant s’y rendre, qu’ils doivent « évaluer attentivement les risques posés à leur sécurité personnelle ». L’avertisseur soulignait que la situation sécuritaire en Algérie restait caractérisée par « des attaques terroristes soutenues, y compris des attaques à la bombe, des faux barrages, des enlèvements, des embuscades et des assassinats qui surviennent régulièrement ».

Aziri M.

… Un jour, tu seras kamikaze, mon fils !

Presque mille ans séparent Hassen Iben Sabah, fondateur en Iran de l’Ordre des Assassins (vers 1091) et Droudkel, alias Mossaâb Abdelwadoud, chef actuel du Groupe salafiste pour la prédication et le combat en Algérie.

Les deux hommes ont cependant plus que l’âme d’assassin en partage, car dans la course au pouvoir, ils ont une stratégie politique commune basée sur la terreur, l’assassinat politique, et ce qui est appelé aujourd’hui l’attentat suicide. Avec le froid du théoricien de la terreur, cheikh Hassen Iben Sabah traçait pour ses adeptes les objectifs : « Il ne suffit pas d’exécuter et de terroriser, disait-il. Il faut aussi savoir mourir. Car si en tuant nous décourageons nos ennemis d’entreprendre quoi que ce soit contre nous, en mourant de la façon la plus courageuse, nous forçons l’admiration de la foule. Et de cette foule, des hommes sortiront pour se joindre à nous. » Surprenant retour d’écho 916 ans après, le 11 avril 2007 à Alger. Un de ces sinistres adeptes, le chef du GSPC, Mossaâb Abdelouadoud, revendiquait le double attentat suicide avec une voix qui lui vient du passé : « Nous disons aux renégats et à leurs maîtres croisés : ayez la nouvelle de la venue des jeunes de l’Islam qui aiment la mort et le martyre comme vous aimez la vie de débauche et de délinquance ; par Allah, nous ne déposerons nos épées ni nous ne savourerons la vie, jusqu’à ce que nous libérions chaque pouce de la terre de l’Islam de tout croisé et de tout renégat et collaborateur (avec l’ennemi), et jusqu’à ce que nos pieds foulent notre Andalousie perdue et notre Jérusalem bafouée (communiqué du GSPC le 11 avril 2007, ndlr) ». Et l’attentat suicide fut… Ce jour-là, 30 morts et plus de 200 blessés. Chez le voisin de l’Est, la Tunisie, l’opération suicide estampillée du sceau d’Al Qaïda s’était manifestée bien avant. Djerba, un certain 11 avril 2002. Le premier attentat suicide au Maghreb prend pour cible une synagogue, ensuite la ville marocaine, Casablanca, des kamikazes se font exploser dans de grands hôtels et restaurants. Les opérations suicide n’ont cessé depuis de se démultiplier. Certains spécialistes y voient la conséquence directe de l’alliance du GSPC avec Al Qaïda (annoncée le 11 septembre 2006 par Aymen Zawahiri, le numéro 2 d’Al Qaïda), d’autres en minimisent l’impact. Scott Atran, anthropologue et psychologue à l’université du Michigan, est de ceux-là. Le chercheur et spécialiste en phénomène kamikaze écarte d’emblée tout lien structurel entre le GSPC et Al Qaïda. « Al Qaïda n’est qu’un logo », dit-il.

Chiite ou sunnite ?

Depuis la neutralisation de ses principaux leaders, Al Qaïda a cessé d’être une « entité opérationnelle ». Pour ce qui est du recours quasi-systématique à l’attentat suicide, l’universitaire américain l’attribue à la nature de l’islamisme militant, une « idéologie sans espoir ». Tout comme l’ont été, selon lui, toutes les idéologies utopistes durant les 100 dernières années, à l’exemple du colonialisme, du communisme, du socialisme, du nationalisme socialiste, du fascisme, de la libérale démocratie, etc. La « faiblesse » des mouvements, comme l’est le GSPC, le force à adopter l’attentat suicide qui lui garantit une existence médiatique certaine. « Le terrorisme s’oxygène aux médias », affirme le spécialiste. Le GSPC, avec cinq attentats suicide « réussis » en moins de six mois, dont trois rien qu’au mois de septembre, (pas loin de la moyenne mensuelle enregistrée par les branches d’Al Qaïda en Irak, en Afghanistan et au Pakistan), est-il réellement un groupe terroriste « désespéré » ? Cela témoigne en tous cas de la situation de faiblesse du GSPC, explique le journaliste et spécialiste de la mouvance islamiste, H’mida Layachi. Selon lui, le choix de la méthode des « âmalyates istichehadya » (opérations martyres) est dicté par la réalité du groupe terroriste, « affaibli militairement et par les divisions internes nées de la charte pour la réconciliation nationale ». Ces divisions auraient atteint leur paroxysme avec l’adoption de la méthode de l’attentat suicide opérée à la faveur du djihad sous la bannière d’Al Qaïda. Cela étant, précise H’mida Layachi, on ne peut comprendre le phénomène « kamikaze » en Algérie si on ne reprend pas la composante islamiste depuis la fin des années 1980. Dans celle-ci, il faudrait distinguer, d’après Layachi, trois générations. La première, dit-il, c’est celle des chefs « idéalistes », des « chouyoukh ». Les « romantiques » de la « Daoula islamia » ont vite été balayés par la « génération des émirs » de 1993 à 1997, pilotée successivement par des déserteurs de l’armée, des Afghans et des émirs qui étaient des ex-voyous. On ne peut isoler non plus le phénomène kamikaze du développement de l’islamisme et du terrorisme international. H’mida Layachi rappelle que l’opération suicide, aâmalia istichehadya, avant qu’elle ne devienne la griffe et le label d’Al Qaïda, est passée des courants religieux à d’autres. L’histoire, souligne-t-il, témoigne combien l’idée de l’opération martyre a fait du chemin, passant du chiisme aux Frères musulmans avant d’être inoculée à la salafia djihadia. Le premier attentat kamikaze moderne a été perpétré au Liban en décembre 1981 par le Hezbollah. La cible désignée par les commanditaires présumés de l’attentat, les mollahs d’Iran, était l’ambassade d’Irak à Beyrouth. De 1982 à 1985, le Liban connaîtra plus d’une quarantaine d’attentats suicide. H’mida Layachi indique que c’est l’aile dissidente des Frères musulmans égyptiens qui était la première à recycler le procédé kamikaze avant de l’inoculer à la salafia (sunnite). Pour rendre « licites » les opérations kamikazes, les terroristes « salafistes » du GSPC, faute de produire leur propre littérature en la matière, recourent aux « textes fondateurs » produits par des oulémas djihadistes d’Orient. H’mida cite parmi eux le cheikh Al Ghamidi. Au Maghreb, et depuis l’attentat suicide de Djerba, qui constitue la première manifestation du phénomène kamikaze dans les pays d’Afrique du Nord, les spécialistes, comme l’opinion publique des trois pays, ne cessent de s’interroger sur les motivations et les ressorts conduisant souvent de très jeunes recrues de la mouvance djihadiste à se porter candidats au martyre. Le phénomène interpelle plus d’une conscience et à plus forte raison lorsque celui-ci devient une « stratégie guerrière », comme c’est pratiquement le cas en Algérie depuis avril 2007. Au lendemain des attentats kamikazes de Casablanca le 16 mai 2003, l’écrivain marocain, Tahar Benjelloun, s’interroge dans sa chronique (publiée dans le journal Le Monde) : « Comment procèdent les recruteurs de la mort ? De quel pouvoir magique disposent-ils pour convaincre des adolescents de se donner la mort en tuant des innocents ? Comment parvient-on à se désister de soi-même, à se retirer de son corps et à l’offrir dans un brasier de sang à une mort certaine emportant dans un élan le maximum de personnes se trouvant dans le lieu et le moment désignés par des commanditaires masqués ? Comment passe-t-on de l’instinct de vie à la passion de la mort ? Pourquoi les jeunes Brésiliens des favelas qui vivent dans une misère noire ne deviennent-ils pas des kamikazes ? Parce qu’ils ne sont pas de culture musulmane, ce qui ne les empêche pas de commettre des délits avec une grande violence. » Autant de questions qui actuellement taraudent nombreux Algériens surtout quand ils repensent à la figure juvénile du kamikaze de Dellys, le 21 septembre dernier.

Phénomène de société, phénomène à la mode

Pour le sociologue Nacer Djabi, spécialiste de la violence urbaine, le recours à la méthode du kamikaze est devenu un phénomène à la mode. Avec le concours capital des chaînes satellitaires arabes, d’Internet et sur fond de conflits majeurs comme la guerre en Irak ou la guerre livrée contre les Palestiniens, l’acte kamikaze subjugue les foules juvéniles et attire vers lui de nombreux candidats au martyre. Dans le cas de l’Algérie, précise l’universitaire, l’apparition des kamikazes est à interpréter d’abord comme une preuve de faiblesse des groupes terroristes. « Recruter des adolescents est la preuve que les maquis sont en mal de reproduction, de mobilisation. » Son collègue et chercheur au CREAD, Zoubir Arrous, estime, quant à lui, les risques que le GSPC aille dans le sens de l’intensification de ce type d’attentats assez élevé, même si celui-ci se trouve être en « phase terminale ». La crainte viendrait du fait que le pays renferme, selon lui, un « gisement inépuisable » en candidats aux opérations suicide. En juin dernier, 13 « candidats » kamikazes, âgés de 13 à 18 ans, ont été condamnés par le tribunal de Boumerdès à 3 ans de prison avec sursis. Les services de police au Maroc ont démantelé, un mois auparavant, un réseau djihadiste composé de 20 jeunes candidats kamikazes. H’mida Layachi affirme avoir tout récemment récolté le témoignage d’un jeune « déserteur » des maquis du GSPC qui lui a avoué avoir rencontré une centaine de jeunes recrues toutes candidates à l’opération suicide. La nouvelle donne indubitablement froid dans le dos. L’attirance et l’engouement que suscitent les opérations suicide s’expliquent, selon H’mida, par le rôle déterminant que jouent les sites de propagande djihadiste et certains médias arabes qui entretiennent le flou sur les actes relevant de la « résistance » à l’envahisseur et au terrorisme. La propagande djihadiste a démontré, constate-t-il, toute son efficacité au point de transformer l’auteur d’un attentat suicide en « héros » des temps modernes. En Algérie, dit-il, même si le discours officiel ne l’admet pas encore, Al Istichadi est mis sur un piédestal, adulé et mystifié par les foules. Zoubir Arrous trouve, quant à lui, au phénomène des motivations socioéconomiques : « La pauvreté, le chômage, l’absence de perspectives, l’éclatement de la cellule familiale sont autant de ferments pour une situation explosive. » Une « fragilité » remarquablement exploitée par les islamistes ultra et par les recruteurs des groupes terroristes qui transforment le jeune en bombe humaine. Le sociologue fait remarquer que les auteurs de ces attentats sont les « premières victimes » du discours haineux et nihiliste distillés par ces derniers. « Ils n’ont pas choisi, car ils ont été compromis par ceux qui développent une interprétation erronée de la religion, qui versent dans le takfir (…) » « Ce sont des jeunes complètement désabusés, ajoute-t-il, désappointés et blasés et qui se donnent la mort pour un rien ». Le taux élevé de suicide chez les jeunes est, selon lui, très révélateur. « Les Algériens se suicident de plus en plus et par différents procédés : ils se pendent, se flinguent, se jettent du haut d’un pont, d’un immeuble, par el harga (émigration clandestine) sur des barques de fortune. » Le « mal-être » algérien se découvre sous ses effroyables expressions. Phénomène en vogue, celui des harraga, a atteint ces dernières années des proportions plus qu’inquiétantes. Les forces navales algériennes ont révélé fin septembre, qu’entre 2005 et 2007, plus de 2340 candidats à l’émigration clandestine ont été interceptés en pleine mer ou sur les côtes algériennes. 1302 ont été secourus au large et sauvés d’une mort certaine, tandis que les autres ont été interceptés sur les côtes au moment où ils s’apprêtaient à embarquer. En 2007 et jusqu’à septembre dernier, 918 harraga ont été sauvés, et 1382 jeunes harraga ont été interceptés. Autre manifestation du désespoir, le suicide. En Algérie, on recense un suicide toutes les 12 heures, selon une étude de la Gendarmerie nationale. La même étude qui reprend des statistiques officielles entre 1999 et 2005 indique que le taux de suicides a connu un « bond effrayant », passant de 0,94 en 1999 à 2,25 pour 100 000 habitants en 2003, soit 3709 cas de suicide, dont 2785 hommes et 1423 tentatives de suicide dont 848 femmes. Les sociologues s’accordent à relier ces phénomènes de société. Mlle Boukaoula, la responsable de la cellule d’écoute psychologique de la Gendarmerie nationale, initiatrice de rencontres de sensibilisation des jeunes contre la propagande dijhadiste menée durant le Ramadhan dans un lycée de Bab El Oued, met en avant la « démission » des parents face à la montée du discours faisant l’apologie du terrorisme et de l’attentat suicide.

Harraga-kamikaze ou la suicide attitude

Le nombre de jeunes rejetés chaque année par l’école algérienne est tout aussi ahurissant. Environ un demi-million de déscolarisés chaque année, selon Osmane Redouane, le porte-parole du syndicat autonome, CLA. Désignés à tort ou à raison comme des « fabriques » potentielles de terroristes, l’école et la mosquée algériennes ont fort à faire avec cette image négative qui leur est collée bon gré, malgré gré. Si « négative » que Aboubakeur Benbouzid et Bouaballah Ghlamallah, respectivement ministres de l’Education nationale et des Affaires religieuses, s’étaient sentis après les derniers attentats kamikazes, contraints à briser le silence. Lors de sa dernière sortie algéroise, M. Benbouzid met en avant comme argument de défense l’attentat kamikaze de Dellys. Devant la presse, le ministre de l’Education a « promis » d’expurger aussi bien l’école de ces « talibans » que les livres et manuels scolaires de toutes les références à l’Islam militant et rétrograde. Le ministre des Affaires religieuses s’est, quant à lui, fondu en mille explications pour défendre les lieux du culte (et les imams) assimilés à des laboratoires où se fabriquent les commandos suicide. Le cas de l’imam, « disparu » de la mosquée de l’Apreval (Kouba), à qui est prêté un rôle décisif dans le recrutement et l’endoctrinement de jeunes kamikazes, comme Nabil Belkacemi, reste édifiant. Mais pour Bouabdellah Ghlamallah, il ne s’agit que d’« une hirondelle qui ne fait pas le printemps ». Tout en reconnaissant l’existence d’un discours « extrémiste » au sein de certaines mosquées, le ministre réfute l’accusation selon laquelle les lieux de prières aient été impliqués dans le recrutement des auteurs d’attentat suicide. D’après lui, le recrutement des kamikazes ne se fait pas à l’intérieur des mosquées, mais par l’entremise du « milieu de la drogue ». Dans le même entretien, le ministre des Affaires religieuses affirme que l’Etat a pris des « mesures » pour reprendre aux salafistes notamment le contrôle des mosquées et surtout les mosselas (salle des prières non autorisée). Et en Algérie, il y a quelque 14 500 mosquées à surveiller de près.

Aziri M.

Les attentats suicide en hausse dans le monde

Les attentats suicide sont en nette augmentation, depuis 1980, dans le monde et impliquent de plus en plus d’adolescents, en tant qu’auteurs, mais aussi victimes de ces actes, affirment des spécialistes américains du terrorisme.

« L’attentat suicide vise à tuer le maximum de personnes au sein de tel ou tel groupe ciblé, son objectif étant de causer la peur et le chaos susceptibles d’entraîner une évolution politique d’un type ou d’un autre », a affirmé Robert Pape, politologue à l’université de Chicago et directeur du projet de Chicago sur le terrorisme par suicide, cité par le département d’Etat. Selon les statistiques du centre national antiterroriste des Etats-Unis, le nombre d’enfants victimes de ces attentats a augmenté de plus de 80% en 2006 par rapport à 2005, avec plus de 1800 enfants tués ou blessés en 2006. Selon M. Pape, les adolescents âgés de 15 à 18 ans représentent environ le cinquième des kamikazes. Il souligne par ailleurs que le recrutement de femmes qui représentent un cinquième environ des auteurs d’attentats suicide et d’adolescents « suit la stratégie fondamentale qui est d’éviter de se faire rapidement repérer par les forces de l’ordre ». Selon Marc Sageman, médecin de formation et chercheur indépendant en matière de terrorisme, la majorité des terroristes d’Al Qaïda, plus de 80% des auteurs d’attentats, sont issus de familles aux croyances religieuses très modérées, voire tout à fait laïques, et que 84% d’entre eux se sont « radicalisés » en Occident et non dans leur pays d’origine. « Les tactiques impliquant le suicide ont été adoptées par un nombre croissant d’organisations terroristes de par le monde parce que ces actes sont choquants, meurtriers, très efficaces en fonction de leur coût et très difficiles à prévenir », précise Bruce Hoffman. Il estime que les attentats suicide entrent dans le cadre d’une campagne plus vaste « visant à saper la confiance de la population dans ses institutions et dans les pouvoirs publics, à flétrir le moral de tout un peuple et à répandre l’effroi et l’intimidation ».

A. Z.

33 Responses to “Cinq attentats suicide en six mois : Le kamikaze, ce nouvel ennemi”

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  32. daniel Says:

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    thanks for information!

  33. jamie Says:

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    tnx for info!

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